Le jour vient de se lever sur Hassaké, une ville de 200 000 habitants du Nord-Est syrien. Abou Dergham, 70 ans, montre du doigt les épais murs d’enceinte de la prison de Ghwayran, à l’intérieur de laquelle seraient encore détenus au moins 3 500 membres présumés de l’Etat islamique. Dans son dos, la devanture de sa modeste quincaillerie est criblée d’impacts de balles, réminiscences d’une spectaculaire prise d’assaut qui a visé le pénitencier voisin en janvier 2022. «Alors que le monde avait déjà oublié Daech, des cellules dormantes ont attaqué la prison, des centaines de combattants se sont échappés, notre ville a été plongée dans la guerre», se remémore-t-il.
Les cicatrices de dix jours d’affrontements – qui ont fait un demi-millier de morts – ne sont pas seulement visibles sur les murs raboteux du quartier. Khaled Khalil, un homme de 37 ans qui a servi dans les Forces démocratiques syriennes (FDS), formées en 2015 pour lutter contre l’Etat islamique, est assommé par le chagrin. Son père et son frère ont été assassinés dans le domicile familial par des membres de l’EI, vêtus de tenues de gardes kurdes dérobées pendant leur évasion : «Tout s’est passé en cinq minutes, l’Etat islamique nous hante encore.»
Un sentiment qui semble ici largement partagé. D’autant qu’Hassaké et s