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Enquête

Du Liban à l’Autriche, sur la trace des tueurs braqueurs de Bourj Hammoud

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Après le braquage meurtrier d’une bijouterie arménienne à Beyrouth en 1985, les auteurs du crime, évadés de prison, ont refait leur vie comme joailliers à Vienne. Depuis 2017, les familles des victimes tentent d’obtenir justice devant les tribunaux autrichiens.
La bijouterie Mazbani, qui appartient à Panos Nahabedian, à Vienne. (Michael Rathmayr/Libération)
par Amani Dhifaoui
publié le 14 mars 2023 à 7h45

En ce mardi de janvier, dans une rue grise de Vienne, Annie Kurkdjian marque le pas. Elle s’arrête sur le trottoir. «Je ne m’approcherai pas plus, dit-elle, c’est le dernier visage que mon père a vu avant de mourir, je ne veux pas le croiser.» Elle est venue dans la capitale autrichienne pour ça. Pour faire avancer l’instruction qui vise l’assassin de son père. Après des années d’enquête marquées par d’extraordinaires coïncidences et de rocambolesques péripéties, Annie Kurkdjian sait où le trouver.

Ce visage qu’elle ne veut pas voir est celui de George Mazbanian, alias Panos Nahabedian, patron d’un commerce de joaillerie. C’est aussi pour retrouver sa trace qu’elle a fait le voyage depuis Beyrouth et accepté que Libération l’accompagne. Cette visite aux alentours de sa boutique s’impose comme un pèlerinage. Une façon de se rappeler «tout ce qu’il m’a pris», glisse-t-elle.

Annie Kurkdjian, la cinquantaine, avait 12 ans quand Panos Nahabedian et ses deux frères, Raffi et Hratch Nahabedian, ont été inculpés pour l’assassinat de son père et de ses quatre employés. Elle a grandi avec le poids de ce crime, une affaire résolue, apparemment sans intrigue : elle sait qui a tué, elle sait pourquoi, elle sait comment. Sa quête n’est pas de vérité, mais de justice.

Le crime

«Faites que les tueurs ne soient pas des Arméniens»

L’histoire commence le 28 mars 1985 au Liban. Au cœur du quartier arménien Bourj Hammoud, trois individus armés s’introduisent dans l’atelier d’un joaillier, Hrant Kurkdjian. Ils l’abattent ainsi que