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Tensions

En Allemagne, la crise au Moyen-Orient alimente la peur d’une poussée d’antisémitisme

Guerre au Proche-Orientdossier
Une synagogue de Berlin a été attaquée au cocktail Molotov dans la nuit de mardi à mercredi, sur fond de recrudescence des actes antisémites en Allemagne depuis l’attaque du Hamas du 7 octobre.
Des policiers montent la garde devant le complexe immobilier qui abrite une synagogue, un jardin d'enfants et un centre communautaire, dans le centre de Berlin, mercredi 18 octobre 2023. (Markus Schreiber/AP)
publié le 18 octobre 2023 à 14h01

Redoutée depuis l’attaque sanglante du Hamas contre Israël, le 7 octobre, l’exportation en Europe de la guerre au Moyen-Orient devient une réalité en Allemagne. Des affrontements violents entre policiers et manifestants propalestiniens ont secoué Berlin dans la nuit de mardi à mercredi. La foule scandait «Israël, Etat terroriste !» pour protester contre la mort de plusieurs centaines de personnes dans le bombardement d’un hôpital gazaoui quelques heures plus tôt (Israël dément être à l’origine de ce drame et l’attribue à un tir de roquette de l’organisation Jihad islamique palestinien). Un centre juif a été visé par deux tirs de cocktails Molotov, dans le centre de la capitale.

Menace accrue sur les institutions et les personnes juives

Le site, qui abrite une synagogue et une école talmudique, n’a pas été endommagé, et personne n’a été blessé : selon les informations communiquées par les forces de l’ordre, les armes étaient bien fonctionnelles, mais les deux assaillants ont manqué leur cible et celles-ci se sont écrasées sur le trottoir où elles se sont éteintes. Malgré la présence policière aux abords du centre communautaire, les auteurs de l’attaque ont pris la fuite, à pied, et n’ont pas encore été interpellés. Mercredi matin, un homme de 30 ans a été brièvement arrêté sur les lieux après avoir proféré des slogans antisémites, sans que l’on sache s’il était impliqué dans les événements de la nuit.

L’attaque intervient dans un contexte tendu et angoissant pour la communauté juive d’Allemagne, choquée par les distributions de friandises organisées par l’association propalestinienne Samidoun dans le quartier berlinois de Neukölln pour célébrer les massacres commis le 7 octobre. Le 13 octobre, le quotidien Tagesspiel révélait un document interne à la police berlinoise, qui s’inquiétait d’une menace accrue sur les institutions juives ainsi que les «personnes visiblement israéliennes et juives» dans la capitale, a fortiori en cas d’aggravation du conflit au Moyen-Orient.

«L’antisémitisme n’a pas sa place en Allemagne»

Ces derniers jours, les autorités locales ont fait état à plusieurs reprises de tags antisémites et d’étoiles de David dessinés sur les murs de la ville – terrible réminiscence de l’époque nazie, lors de laquelle des étoiles jaunes étaient peintes sur les portes des maisons des habitants juifs. La semaine dernière, la police berlinoise a également signalé une agression islamophobe contre une adolescente de 15 ans, qui accusait une inconnue de l’avoir insultée en pleine rue, de l’avoir frappée à coups de pied et d’avoir cherché à lui retirer son voile.

«Les attaques contre les institutions juives, les violentes émeutes dans nos rues – tout cela est inhumain, dégoûtant et ne peut être toléré. L’antisémitisme n’a pas sa place en Allemagne», martèle dans un message publié sur le réseau social X (anciennement Twitter) le chancelier allemand Olaf Scholz, de retour de Tel-Aviv qu’il a dû quitter précipitamment, mardi, en raison d’une alerte à la roquette. L’attaque au cocktail Molotov contre le centre communautaire juif est «une abomination qui doit être condamnée dans les termes les plus forts possibles», abonde Irene Mihalic, cheffe du groupe parlementaire des Verts au Bundestag et membre de la coalition au pouvoir. «Nous avons en Allemagne un problème avec l’antisémitisme, notamment en lien avec Israël», insiste-t-elle. «L’heure est à la clarté morale», a commenté l’ambassade d’Israël en Allemagne, qui s’est dite convaincue «que les autorités allemandes chargées de l’application des lois traiteront cette affaire avec une sévérité implacable».