Le concert avait ébloui des centaines de jeunes Iraniens. Et les avait aussi remplis d’inquiétude. Parce qu’en se produisant cheveux au vent, dans une robe noire ajustée près du corps et les épaules découvertes, Parastoo Ahmadi, 27 ans, et les musiciens qui l’accompagnaient, avaient pleinement conscience des risques encourus. Les représailles n’ont pas tardé, la chanteuse et deux de ses musiciens ont été arrêtés samedi matin. Ils ont tous été libérés dans la nuit de samedi à dimanche, a annoncé leur avocat dimanche matin.
Les autorités iraniennes avaient déjà annoncé, immédiatement après la diffusion du concert, qu’un procès serait ouvert contre la jeune femme et ses musiciens. Parastoo Ahmadi, son guitariste Soheil Faghih-Nassiri et son pianiste Ehsan Beiraghdar ont tous été arrêtés, séparément, a indiqué samedi leur avocat Milad Panahi-Pour. Le compte Instagram de la chanteuse a également été désactivé. «Malheureusement, nous avons appris que Parastoo Ahmadi avait été arrêtée ce matin dans la province de Mazandaran», avait indiqué son avocat, qui avait précisé ne plus avoir de nouvelles depuis et qu’il ne savait pas où la jeune femme et ses musiciens étaient détenus.
Nouvelle héroïne du mouvement «Femme, vie, liberté»
«Je suis Parastoo, une fille qui veut chanter pour les gens qu’elle aime, a-t-elle écrit pour justifier son geste. C’est un droit auquel je ne pouvais pas renoncer – chanter pour le pays que j’aime si passionnément», avait écrit la jeune femme sur son compte Instagram pour expliquer sa décision sans précédent de se produire en concert sans hidjab.
La chanteuse s’est fait connaître lors des manifestations de 2022 en interprétant la chanson emblématique de la contestation Az Khoon e Javanan e Vatan ou «Du sang de la jeunesse de la patrie», partagée sur son compte Instagram aux 337 000 abonnés. Depuis la révolution islamique, les femmes iraniennes n’ont pas le droit de chanter dans les rassemblements publics, sauf dans les lieux exclusivement féminins, et leurs voix sont interdites à la radio et à la télévision. Le geste de Parastoo était donc doublement audacieux et son arrestation crée une nouvelle héroïne du mouvement «Femme, vie, liberté».
Nouvelle loi
Ce concert d’une demi-heure s’est déroulé au milieu de débats houleux en Iran sur une nouvelle vague de lois draconiennes sur le hijab. Ces mesures restrictives, qui criminalisent les femmes simplement parce qu’elles sont des femmes, prévoient des sanctions sévères, telles que de lourdes amendes, l’interdiction d’accéder à des services sociaux et de voyager, et pourraient être adoptées d’ici à la fin du mois.
Mise à jour : le 15 décembre à 11 h 17 avec l’annonce de la libération des musiciens dans la nuit.