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Proche-Orient

En Israël, Catherine Colonna hausse le ton pour une trêve immédiate à Gaza

La ministre française des Affaires étrangères est en Israël ce dimanche 17 décembre pour dénoncer les violences sexuelles commises par le Hamas le 7 octobre, mais aussi pour appeler à un arrêt des combats «immédiat et durable» dans l’enclave palestinienne.
La ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna, avec le porte-parole de l'armée israélienne, Olivier Rafowicz, à son arrivée sur la base militaire de Shura, transformée en morgue, ce dimanche 17 décembre. (Leo Correa/AP)
publié le 17 décembre 2023 à 15h31
(mis à jour le 17 décembre 2023 à 18h06)

Quatre visites en deux mois. Après un report de son déplacement samedi 16 décembre au Liban à la suite de l’avarie technique du Falcon 900 du gouvernement, la cheffe de la diplomatie française, Catherine Colonna, est arrivée dimanche matin à Tel-Aviv. L’objectif : réitérer la solidarité de la France avec les victimes des massacres du 7 octobre, tout en haussant le ton en faveur de la cessation des combats dans la bande de Gaza, où les intenses bombardements israéliens se poursuivent. Paris s’est d’ailleurs dit «préoccupé au plus haut point» par la dégradation de la situation humanitaire dans l’enclave. Ces éléments de langage confirment l’inflexion de la position française dans cette guerre, alors que l’armée israélienne est accusée par de nombreuses ONG de commettre des «crimes de guerre» dans cette offensive meurtrière.

A sa sortie de l’avion, Catherine Colonna a été accueillie par son homologue, Eli Cohen. La ministre a très vite appelé à une «nouvelle trêve immédiate et durable» dans la bande de Gaza, alors que la riposte israélienne après l’attaque terroriste du Hamas a déjà fait près de 19 000 morts, dont 70 % de femmes et enfants, selon le Hamas. Un peu plus tôt, dans une déclaration commune, le Royaume-Uni et l’Allemagne avaient eux aussi appelé à un «cessez-le-feu durable» mais n’avaient pas demandé que celui-ci soit «immédiat». Alliés historiques de l’Etat hébreu, les Etats-Unis ont fait monter la pression sur les autorités israéliennes ces derniers jours, les incitant à passer à une phase moins intensive de leur offensive afin de protéger les civils. «Trop de civils sont tués», a confirmé Catherine Colonna à l’issue de la rencontre, rappelant que trois Français sont toujours «disparus ou otages dans la bande de Gaza». Vendredi, l’armée israélienne avait annoncé avoir récupéré la dépouille de l’otage franco-israélien Elya Toledano, kidnappé par l’un des commandos du Hamas lors du festival de musique Tribe of Nova, le 7 octobre.

«Cadeau pour le Hamas»

Malgré ces inquiétudes grandissantes, Eli Cohen, connu pour être l’une des personnalités les plus modérées du gouvernement de Benyamin Nétanyahou, a martelé la position de son pays : un appel au cessez-le-feu serait une «erreur», même un «cadeau pour le Hamas.» La cheffe de la diplomatie française a également évoqué avec le porte-parole de Tsahal la mort d’un employé du Quai d’Orsay dans un bombardement israélien survenu mercredi soir à Rafah, dans le sud de l’enclave palestinienne. L’agent, dont l’identité a été révélée dimanche soir par plusieurs députés, travaillait pour l’Institut français de Gaza depuis 2022. Ahmad Abu Shamla avait fait le choix de ne pas évacuer et de rester auprès de ses quatre plus grands fils. Il était réfugié dans la maison d’un de ses collègues du consulat général de France lorsqu’il a été tué. Samedi, Paris a condamné ce drame et exigé que «toute la lumière soit faite dans les plus brefs délais».

La ministre des Affaires étrangères s’est ensuite rendue à Shura, une ancienne base militaire aménagée en morgue, dans le sud de Tel-Aviv, pour échanger avec des responsables d’ONG spécialisées dans la lutte contre les violences sexuelles. Avec un message : on vous croit.

Eviter une guerre avec le Hezbollah

Dimanche après-midi, Catherine Colonna a poursuivi sa visite en Cisjordanie occupée où elle a rencontré des Palestiniens expulsés de force par des colons israéliens. Dans une localité proche de Ramallah, où elle s’est entretenue avec des producteurs d’olives chassés de leurs terres, elle a dénoncé ces violences, qui «minent la perspective d’une solution politique» avec Israël. Une manière de rappeler que la France souhaite des sanctions contre les extrémistes responsables de ces exactions.

Lundi, elle décollera pour Beyrouth dans l’espoir d’«éviter l’embrasement régional», alors que l’escalade se poursuit à la frontière entre le Liban et Israël. Le ministre israélien Eli Cohen a estimé que la France pouvait jouer un «rôle important» afin d’empêcher une guerre avec le Hezbollah, le mouvement chiite libanais, soutien du Hamas, qui multiple les tirs vers l’Etat hébreu depuis plus de deux mois. Dimanche, Tsahal a une nouvelle fois affirmé avoir répondu à des tirs depuis le territoire libanais. «Si le Hezbollah veut monter d’un cran, nous en monterons de cinq», a prévenu le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant. «S’il y avait un engrenage, un embrasement, je crois que personne n’en bénéficierait, et je le dis aussi à Israël», a pour sa part déclaré la cheffe de la diplomatie française, en présence d’un haut responsable de l’armée israélienne. Paris, notamment, «passe les messages nécessaires» aux autorités libanaises et au Hezbollah, a-t-elle dit, mais «cet appel à la prudence et à la désescalade vaut pour tous».

Mis à jour le 17/12/2023 à 18h06 avec suite de la visite en Cisjordanie, déclaration de Berlin et Londres et déclarations sur le Liban.