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Colère

En Israël, les difficiles commémorations des attaques terroristes du 7 Octobre

Guerre au Proche-Orientdossier
Prise de parole de Benyamin Nétanyahou, temps de recueillement dans les kibboutz les plus durement touchés, cérémonies alternatives pour boycotter le gouvernement… L’Etat hébreu se prépare à se remémorer ce jour meurtrier dans un contexte tendu.
Lors d'une manifestation en soutien aux otages israéliens, à Tel-Aviv, ce dimanche 6 octobre. (Gonzalo Fuentes/Reuters)
par Camille Neveux et Nicolas Rouger, correspondant à Tel-Aviv
publié le 6 octobre 2024 à 14h46

C’est un pays en état d’alerte qui s’apprête à se souvenir de cette funeste journée, la plus meurtrière en Israël depuis sa création, en 1948. «Cette semaine, nous commémorerons l’anniversaire de la guerre et du 7 Octobre, a déclaré samedi 5 octobre le porte-parole de l’armée israélienne, le contre-amiral Daniel Hagari, à la télévision. Nous sommes prêts à augmenter nos forces en prévision de ce jour.» Notamment par crainte d’attentats que chercheraient à commettre des combattants, alors que de nombreuses cérémonies sont prévues dans divers endroits du pays. Chacun de son côté, à l’image d’un pays profondément traumatisé et divisé.

La première commencera dès ce dimanche 6 octobre à Tel-Aviv, où les familles des otages toujours captifs dans la bande de Gaza prévoient un rassemblement pour exiger leur libération. Au total, 251 otages avaient été kidnappés puis emmenés dans l’enclave ; un an plus tard, 97 sont toujours retenus en captivité, dont 33 déclarés morts. Le lendemain, lundi 7 octobre, le chef de l’Etat, Isaac Herzog, présidera une cérémonie commémorative à Sdérot, l’une des villes les plus durement touchées par les attaques terroristes perpétrées par le Hamas palestinien, où 1 205 personnes sont mortes, en majorité des civils.

Morceau de musique tronqué

Parmi les autres événements prévus lundi figure une commémoration en comité restreint dans le parc adjacent au kibboutz de Réïm, qui débutera avec un morceau de musique tronqué à 6h29 exactement, heure à laquelle le festival de musique trance Nova a été interrompu par les premières sirènes. Au moins 370 personnes y ont perdu la vie, dont plusieurs Français. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, devrait d’ailleurs y marquer officiellement la participation hexagonale en se recueillant sur place dans la matinée. Un autre rassemblement du même type aura également lieu dans un kibboutz proche, Be’eri, où plus de 100 personnes ont été tuées. Certains ont même choisi d’inviter des survivants de l’attaque dans leur propre maison, pour parler en petit comité de leur expérience, dans l’esprit de Zikaron baSalon ou «souvenir au salon», comme c’est le cas chaque année avec des témoins de l’Holocauste.

A Tel-Aviv, des dizaines de milliers d’Israéliens devaient assister à une cérémonie alternative, organisée au parc Hayarkon par les victimes de l’attaque qui ne veulent pas participer aux commémorations organisées par le gouvernement – accusé d’avoir échoué avant, pendant et depuis l’assaut du groupe palestinien. Pour l’exécutif, «tout est un spectacle», a fustigé Daniel Rahamim, membre du kibboutz Nahal Oz. «Le 7 octobre, je serai aux côtés des familles endeuillées, des familles des otages et des communautés qui souffrent, pour une soirée de souvenir et d’espoir», a de son côté déclaré Rotem Sela, actrice et présentatrice israélienne qui co-animera l’événement au parc Hayarkon avec Hanoch Daum, acteur et comédien israélien.

«Israël a le devoir et le droit de se défendre»

A cause des nouvelles restrictions en vigueur dans la région de Tel-Aviv depuis l’escalade des tensions avec l’Iran, cette grande cérémonie du souvenir ne se tiendra plus qu’en comité restreint. Un noyau dur de familles endeuillées sera présent pour l’événement, qui sera retransmis sur toutes les chaînes israéliennes et sur 50 autres à travers le monde. Au moins 150 villes ont indiqué avoir mis en place des projections ; à 19h10 exactement (18h10 heure française), une minute de silence aura lieu.

Le Premier ministre, Benyamin Nétanyahou, devrait, lui, prononcer lundi un discours à la nation dans un contexte plus qu’explosif : l’armée israélienne a indiqué samedi «préparer une réponse» à l’attaque massive de l’Iran, qui a tiré mardi 1er octobre près de 200 missiles sur l’Etat hébreu. «Israël a le devoir et le droit de se défendre et de répondre à ces attaques, et c’est ce que nous ferons», a embrayé le chef de l’Etat un peu plus tard dans un communiqué.

Les événements officiels du 7 Octobre n’ont pas encore été annoncés publiquement. Une «production télévisée soignée et coûteuse», des «discours de hauts responsables» et un «public de milliers de personnes», avait un temps été envisagés, selon le quotidien britannique The Guardian. Avant que le gouvernement n’annule tout en raison de la colère des victimes et de leurs proches. Le Forum des otages et des familles a prévu, lui, de se rassembler lundi à 6h29 devant la résidence du Premier ministre, rue Gaza, à Jérusalem, au son des sirènes. «Ensemble, nous sonnerons un signal d’alarme qui ne pourra être ignoré», déclarent ses membres dans une invitation à la presse. Tout un symbole.