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En Turquie, un polar écrit à quatre mains à travers les barreaux d’une prison devient le roman de l’été

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L’écrivain turc Yigit Bener et le dirigeant kurde Selahattin Demirtas, emprisonné depuis 2016, ont entamé il y a un an une correspondance qui a donné naissance le 5 juillet au roman noir «Duo au purgatoire», que la Turquie s’arrache.
A gauche: Selahattin Demirtas le 20 août 2015 A droite: Yigit Bener le 31 juillet 2024 (B. Ericson/Y. Akgul/AFP)
publié le 10 août 2024 à 10h47

La genèse de ce projet fou part d’un exemplaire du roman de Céline, Voyage au bout de la nuit, adressé à un prisonnier turc au fin fond de sa geôle avec un mot d’encouragement : «L’expression de ma solidarité.» Mais le détenu n’est pas n’importe qui et l’auteur de la missive non plus. Le premier, le leader kurde Selahattin Demirtas, 51 ans, est emprisonné depuis 2016 et a été condamné en mai à quarante-deux ans de prison. Le second, Yigit Bener, auteur et traducteur de 66 ans, issu d’une lignée d’écrivains, a connu l’exil politique dans les années 1980, direction la France. Le colis, remis par l’intermédiaire de l’avocat de «Selo», signe le début d’un long échange épistolaire qui a débouché sur un polar écrit à quatre mains, rapide et enlevé. Depuis sa sortie, Arafta Düet ou Duo au purgatoire (éditions Dipnot, non traduit) est classé parmi les meilleures ventes du pays.

Les deux hommes, pourtant, ne se sont jamais rencontrés. «Je connaissais Demirtas comme lecteur, confie Yigit Bener. J’avais acheté son recueil de nouvelles, l’Aurore [éditions Emmanuelle Collas]. Il y avait un travail littéraire sérieux, c’était bien écrit et bien ficelé. Cela me rongeait l’esprit q