La distribution d’une aide humanitaire aux réfugiés gazaouis a tourné au chaos. Ce jeudi 29 février, des tirs de l’armée israélienne ont tué au moins 110 Palestiniens qui se ruaient sur des camions d’aide humanitaire à Gaza, a annoncé le Hamas, dénonçant un «massacre». Des sources israéliennes ont confirmé ces tirs à balles réelles dans la journée, précisant que les soldats se sont sentis «menacés». Tout en rejetant la responsabilité de l’armée dans la lourdeur de ce bilan, Tsahal évoquant sur X par ailleurs des «dizaines de morts et de blessés car piétinés ou écrasés par les camions».
Le président français Emmanuel Macron a exprimé vendredi 1er mars sa «plus ferme réprobation» après le drame. «Profonde indignation face aux images qui nous parviennent de Gaza où des civils ont été pris pour cible par des soldats israéliens, écrit le chef de l’Etat sur X. J’exprime ma plus ferme réprobation envers ces tirs et demande la vérité, la justice et le respect du droit international.»
Profonde indignation face aux images qui nous parviennent de Gaza où des civils ont été pris pour cible par des soldats israéliens.
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) February 29, 2024
J'exprime ma plus ferme réprobation envers ces tirs et demande la vérité, la justice et le respect du droit international.
Les Etats-Unis ont exigé dans la soirée qu’Israël apporte «des réponses» après la mort de plus de 110 personnes, selon le Hamas, lors d’une distribution d’aide à Gaza qui a tourné au chaos, Washington évoquant une situation «désespérée». «Nous recherchons de toute urgence des informations supplémentaires sur ce qui s’est passé exactement», a déclaré à la presse le porte-parole du département d’Etat, Matthew Miller, qui a présenté ses condoléances aux personnes tuées. «Nous sommes en contact avec le gouvernement israélien depuis tôt ce matin et comprenons qu’une enquête est en cours. Nous suivrons cette enquête de près et nous ferons pression pour obtenir des réponses», a-t-il ajouté.
Portraits
Le porte-parole du secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, Stéphane Dujarric, a «condamné» les événements. «Nous ne savons pas exactement ce qui s’est passé. Mais que ces gens aient été tués par des tirs israéliens, qu’ils aient été écrasés par la foule, ou renversés par des camions, ce sont des actes de violence, d’une certaine manière, liés à ce conflit», a-t-il déclaré, précisant qu’il n’y avait pas de présence de l’ONU lors de cette distribution d’aide.
Après bientôt cinq mois de guerre entre Israël et le mouvement islamiste, l’ONU estime que 2,2 millions de personnes, soit l’immense majorité de la population, sont menacées de famine dans la bande de Gaza assiégée par Israël. Cette situation dramatique se concentre tout particulièrement dans le Nord où les destructions, les combats et les pillages rendent presque impossible l’acheminement de l’aide humanitaire. Le ministère de la Santé du Hamas a annoncé, ce jeudi, un bilan de 104 morts et 760 blessés supplémentaires.
Des témoins ont raconté à l’AFP des scènes pendant lesquelles des milliers de personnes se sont précipitées vers des camions d’aide dans un rond-point à l’ouest de Gaza. Les pays médiateurs ont dit espérer une trêve avant le début du ramadan, qui commence le soir du 10 ou le 11 mars, mais sans faire état d’avancées concrètes. «Cette violence effroyable et ces souffrances doivent cesser. Cessez-le-feu», a écrit sur X le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus.
«La famine se profile»
A travers la bande de Gaza, les civils sont pris au quotidien dans les combats et les bombardements, qui n’ont épargné aucune zone, dévasté des quartiers entiers et forcé des milliers de familles à fuir. «Nous n’avons pas mangé de pain depuis deux mois. Nos enfants sont affamés», a raconté à l’AFP Muhammad Yassin, un homme de 35 ans habitant à Zeitun, dans le Nord, qui est sorti tôt le matin pour acheter de la farine et a trouvé «des milliers de gens qui attendaient depuis de longues heures pour avoir un ou deux kilos de farine». Selon l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), les besoins humanitaires sont «illimités». «La famine se profile. Les hôpitaux se sont transformés en champs de bataille. Un million d’enfants font face à un traumatisme quotidien», a affirmé l’Unrwa.
Reportage
Les combats, selon l’armée israélienne, continuent à faire rage dans le Nord à Zeitun, un quartier de la ville de Gaza, ainsi que dans le centre du territoire et à Khan Younès, dans le sud de l’enclave palestinienne. Poussés toujours plus vers le sud à mesure que les combats s’étendaient, des centaines de milliers de déplacés ont gagné Rafah, une ville collée contre la frontière fermée avec l’Egypte.
Près d’un million et demi de Palestiniens, selon l’ONU, sont à présent massés, sans échappatoire, dans cette ville bombardée quotidiennement, où le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a promis de lancer une offensive, afin de vaincre le Hamas dans son «dernier bastion». En dépit des multiples mises en garde internationales, Benyamin Nétanyahou a affirmé qu’une trêve ne ferait que «retarder» une telle offensive.
Le Qatar, les Etats-Unis et l’Egypte tentent d’arracher un accord portant, selon une source du Hamas, sur une trêve de six semaines, durant laquelle un otage, parmi des femmes, mineurs et personnes âgées malades, serait échangé chaque jour contre dix Palestiniens détenus par Israël. Lundi, le président américain, Joe Biden, a évoqué «un accord des Israéliens selon lequel ils ne s’engageraient pas dans des opérations durant le ramadan», afin de «faire sortir tous les otages». Mais le Hamas réclame notamment un cessez-le-feu définitif avant tout accord sur la libération des otages, ainsi que la levée du blocus israélien imposé à Gaza depuis 2007 et l’entrée d’une aide humanitaire accrue.
Mise à jour : à 19 h 10 avec la réaction du porte-parole du secrétaire général de l’ONU.
Mise à jour : à 20 h 42 avec la réaction des Etats-Unis.
Mise à jour : vendredi 1er mars à 7 h 45 avec la réaction d’Emmanuel Macron.