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Guerre à Gaza : les pays arabes adoptent un plan pour la reconstruction de l’enclave palestinienne

Guerre au Proche-Orientdossier
Lors d’un sommet organisé au Caire à l’initiative du président Sissi, les dirigeants de la Ligue arabe ont adopté ce mardi 4 mars un plan alternatif à celui proposé par Donald Trump, qui envisage le déplacement des Palestiniens de l’enclave, fantasmée en «Riviera» par le président américain.
Le président palestinien, Mahmoud Abbas, et le président intérimaire syrien, Ahmed al-Charaa, avant le sommet arabe d'urgence organisé par l'Egypte au Caire, ce mardi 4 mars 2025. (Bureau du président palestinien/via REUTERS)
publié le 4 mars 2025 à 20h50
(mis à jour le 4 mars 2025 à 21h57)

Les dirigeants de la Ligue arabe ont adopté ce mardi 4 mars au Caire un plan pour la reconstruction de la bande de Gaza, mettant à l’écart le Hamas et présenté comme une alternative au projet de Donald Trump de placer le territoire sous contrôle américain. Réunis au Caire, les dirigeants des pays de la Ligue arabe ont mis en garde contre les tentatives «odieuses» de déplacement de la population de Gaza et appelé à unifier les Palestiniens sous le parapluie de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), dont le mouvement islamiste Hamas ne fait pas partie.

Ils ont convenu de créer un fonds destiné à financer la reconstruction de Gaza, détruite par 15 mois de guerre entre Israël et le Hamas, en appelant à une contribution internationale pour accélérer le processus. Le plan présenté par l’Egypte représente un montant de 53 milliards de dollars sur cinq ans, une estimation équivalente à celle de l’ONU, pour reconstruire la bande de Gaza. La bande de Gaza serait administrée durant une période transitoire par un comité de technocrates palestiniens, avant que l’Autorité palestinienne n’en reprenne le contrôle.

Le président Abdel Fattah al-Sissi a déclaré qu’il garantirait le maintien des 2,4 millions d’habitants de Gaza sur leur terre, une réponse au projet du président américain qui prévoit leur expulsion vers l’Egypte et la Jordanie pour faire du territoire la «Riviera du Moyen-Orient». Il n’a toutefois pas critiqué le plan de Donald Trump, qui avait soulevé un tollé international début février, et affirmé que le président américain était «capable de parvenir à la paix» dans la région. «Toute tentative odieuse de déplacer le peuple palestinien ou […] d’annexer une partie des territoires palestiniens occupés plongerait la région dans une nouvelle phase de conflits […] ce qui constitue une menace claire pour […] la paix» au Proche-Orient, avertit cependant le communiqué final du sommet.

Le ministère israélien des affaires étrangères a toutefois estimé ce mardi soir que ce plan ne tenait pas compte des réalités de la situation après l’attaque du Hamas du 7 Octobre. «Nous saluons le plan de reconstruction de Gaza adopté dans la déclaration finale du sommet», a pour sa part réagi le Hamas dans un communiqué, exprimant également son «soutien à la formation d’un comité […] pour superviser les efforts de secours, la reconstruction et la gouvernance à Gaza».

Le sommet arabe s’est réuni dans un contexte de blocage sur la suite du cessez-le-feu, en place depuis le 19 janvier. La deuxième phase de l’accord de trêve négocié par les pays médiateurs n’a toujours pas fait l’objet d’un accord entre Israël, qui réclame la «démilitarisation totale» de Gaza, et le Hamas, qui insiste pour y rester. Le mouvement islamiste s’était emparé du pouvoir dans le territoire en 2007, après en avoir chassé l’Autorité palestinienne, dirigée par Mahmoud Abbas, qui n’exerce qu’une autorité limitée en Cisjordanie occupée.

Deux phases de reconstruction

«L’Etat de Palestine assumera ses responsabilités dans la bande de Gaza par le biais de ses institutions gouvernementales et un comité de travail a été formé à cet effet», a affirmé devant le sommet arabe Mahmoud Abbas, 89 ans. Le président palestinien, en poste depuis 2005, s’est dit prêt à organiser «l’année prochaine» des élections présidentielle et législatives dans les Territoires palestiniens, «à condition que les conditions appropriées soient réunies». Il n’a pas donné de calendrier ni expliqué comment de telles élections pourraient avoir lieu dans la bande de Gaza en ruine.

Lors du sommet, Sissi a expliqué que, selon le plan proposé par l’Egypte, Gaza serait administrée dans un premier temps par un comité de technocrates palestiniens, avant que l’Autorité palestinienne n’en prenne le contrôle. Le plan égyptien propose également la création d’un fonds supervisé au niveau international pour garantir «la durabilité du financement», ainsi que sa «transparence». Selon le communiqué final du sommet, le fonds «recevra des engagements financiers de tous les pays donateurs et institutions financières» pour mener à bien le projet de reconstruction dans le territoire palestinien, qui devrait se dérouler en deux phases : la première comprenant des infrastructures essentielles et des logements permanents, la seconde des infrastructures incluant un port commercial et un aéroport.

Sissi n’a toutefois pas critiqué le plan de Donald Trump, qui avait soulevé un tollé international début février, et affirmé que le président américain était «capable de parvenir à la paix» dans la région. La première étape, de six mois, doit être consacrée au déblaiement des débris, à l’enlèvement des mines et explosifs, et à la fourniture de logements temporaires pour abriter plus de 1,5 million de personnes.

«Tragédie humanitaire»

Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, lui aussi présent au Caire, a quant à lui affirmé que l’ONU «soutenait fermement» le plan arabe. «Nous espérons un rôle arabe efficace qui mette fin à la tragédie humanitaire créée par l’occupation dans la bande de Gaza» et qui «contrecarre» tout projet de déplacement forcé des Palestiniens, avait déclaré plus tôt le Hamas.

La première phase de la trêve, d’une durée de 42 jours, a pris fin le 1er mars, après avoir permis le retour de 33 otages retenus à Gaza en échange de la libération de 1 800 détenus palestiniens. Les deux camps s’opposent désormais sur la suite du processus, avec pour première conséquence le blocage imposé depuis dimanche par Israël à l’entrée de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza assiégée.

Le gouvernement israélien, lui, est en faveur d’une extension de la première phase de la trêve jusqu’à la mi-avril et d’une accélération des libérations d’otages. Le Hamas a pour sa part rejeté ces conditions et insisté sur la mise en œuvre des deux étapes restantes de l’accord initial, prévoyant la fin définitive de la guerre.

Mis à jour : ce mercredi 5 mars à 7h06, avec l’ajout de l’appel des dirigeants arabes à unifier les Palestiniens sous l’OLP.