Le Proche-Orient est entré dans l’année 2024 sans pause dans la violence. Israël et le Hamas continuent à échanger les tirs meurtriers, tandis que des ministres d’extrême droite du gouvernement de Nétanyahou plaident pour chasser les Palestiniens de la bande de Gaza et y réinstaller des colons juifs. Pendant ce temps, l’armée israélienne renvoie des réservistes chez eux, mais sans doute pour mieux les faire revenir et reprendre le combat à Gaza. Et dans une procédure civile, 42 survivants du festival Nova réclament 200 millions de shekels (plus de 50 millions d’euros) à l’Etat israélien, accusé de «négligence criminelle».
Des échanges de tirs pour le réveillon
La nuit de dimanche à lundi a une nouvelle fois été illuminée par les explosions. L’armée israélienne a poursuivi son pilonnage intensif du territoire palestinien, tandis qu’à minuit pile, le Hamas a tiré des roquettes sur Tel-Aviv et le sud de l’Etat hébreu. Les brigades Ezzedine al-Qassam, branche armée du mouvement islamiste, ont revendiqué les deux attaques, qui n’ont pas fait de victime, en «réponse aux massacres de civils» perpétrés par Israël.
Selon le Hamas, au pouvoir dans l’enclave, les raids aériens nocturnes de l’armée israélienne ont visé Khan Younès et Rafah, ainsi qu’au moins sept autres localités de la bande de Gaza, faisant 24 morts et plusieurs dizaines de blessés parmi les civils. La veille, au moins 68 Palestiniens avaient été tués dans des frappes sur la ville de Gaza, selon la même source dont les dires ne peuvent être vérifiés.
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De son côté, l’armée israélienne a déclaré avoir tué plus d’une dizaine de combattants ennemis lors d’affrontements au sol, de frappes aériennes et de tirs de chars, ajoutant avoir localisé des tunnels du Hamas et des explosifs dans une école maternelle.
Selon un bilan annoncé ce lundi par le ministère de la Santé du Hamas, 21 978 personnes ont été tuées, en majorité des femmes, des adolescents et des enfants, ont été tuées dans le petit territoire palestinien surpeuplé depuis le début de la guerre, et 57 697 blessés.
L’armée israélienne retire des réservistes de Gaza
Près de trois mois après le début de la guerre, le porte-parole de l’armée israélienne, Daniel Hagari, a annoncé dimanche soir qu’une partie des réservistes engagés dans la bande de Gaza allaient se retirer. Plus précisément, cinq brigades, soit «plusieurs milliers de soldats», vont rentrer chez eux, afin d’«aider à relancer l’économie», de «se former» et de «reprendre des forces» en vue des «combats prolongés» à venir.
L’armée «doit planifier à l’avance car nous serons sollicités pour des tâches et des combats supplémentaires tout au long de cette année», a souligné le porte-parole de Tsahal, cité par le Times of Israël. La guerre se poursuivra encore pendant «de nombreux mois», a averti dimanche le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou.
Peu après l’attaque du Hamas le 7 octobre, l’Etat hébreu avait décrété la mobilisation de 300 000 réservistes, soit l’équivalent de 4 % de la population de ce pays de 9 millions d’habitants. L’armée régulière, «Tsahal» (pour Tsva ha-Haganah le-Israël, soit «l’armée de défense d’Israël»), est forte de 170 000 hommes et femmes. On ignore toutefois le nombre de troupes concrètement engagées dans les combats à Gaza.
Un deuxième ministre israélien défend «l’émigration» de Gaza au profit de la colonisation
Au lendemain d’une déclaration similaire d’un autre ministre d’extrême droite, le ministre israélien de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, a appelé ce lundi le Premier ministre, Benyamin Nétanyahou, à profiter de la guerre avec le Hamas pour saisir «l’occasion de mettre au point un projet visant à encourager l’émigration des habitants de Gaza vers d’autres pays du monde».
Selon le ministre de la Sécurité nationale, cela permettrait ensuite de «de ramener chez eux les habitants de la zone frontalière et du Goush Katif», l’ancien bloc de colonies au sud de la bande de Gaza évacué en 2005.
Itamar Ben Gvir, chef du parti d’extrême droite Force juive, a été inculpé plus de 50 fois dans sa jeunesse pour incitation à la violence ou pour des discours de haine, et condamné en 2007 pour soutien à un groupe terroriste et incitation au racisme. Fervent partisan de la colonisation juive en Cisjordanie, il a plaidé à plusieurs reprises pour l’annexion de ce territoire palestinien occupé.
Négociations de trêve, réponse palestinienne attendue
Les médiateurs internationaux, menés par le Qatar et l’Egypte, étaient parvenus à négocier une trêve d’une semaine fin novembre ayant permis la libération de plus de 100 otages et l’entrée à Gaza d’une aide limitée. Ils poursuivent actuellement leurs efforts en vue d’une nouvelle pause dans les combats.
Une délégation du Hamas, mouvement classé organisation terroriste par l’UE, les Etats-Unis et Israël notamment, s’est rendue vendredi au Caire pour transmettre «la réponse des factions palestiniennes» à un plan égyptien prévoyant la libération d’otages et une pause dans les hostilités.
Cette réponse sera donnée «dans les prochains jours», a affirmé dans un communiqué Muhammad al-Hindi, secrétaire général adjoint du Jihad islamique, un groupe armé combattant aux côtés du Hamas.
42 survivants du festival Nova attaquent l’Etat israélien en justice
C’est la première procédure civile depuis le massacre du 7 octobre, selon le site Ynet, qui rapporte lundi l’information. Pour certains blessés physiquement, tous marqués mentalement à vie, 42 survivants du festival Tribe of Nova, transformé en carnage par le Hamas, ont décidé d’attaquer l’Etat israélien, à qui ils réclament 200 millions de shekels (plus de 50 millions d’euros).
«Un simple appel téléphonique de responsables de Tsahal aux responsables de la rave party de se disperser immédiatement, compte tenu du risque attendu, aurait sauvé leur vie et évité des blessures physiques et mentales à des centaines de participants», accusent les plaignants dans cette procédure qui vise à la fois le ministère de la Défense, la police israélienne et le Shin Bet (renseignement intérieur).
Pour les avocats Anat et Gilad Ginzburg, qui représentent les 42 rescapés, cette plainte vise à pointer «de graves omissions et une négligence criminelle des accusés […] qui ont causé de graves handicaps aux plaignants et détruit leurs vies.» Le samedi 7 octobre à l’aube, plus de 360 jeunes fêtards ont été tués, parfois brûlés vifs, par les assaillants du Hamas, soit près d’un tiers des quelque 1 200 personnes tuées ce jour-là dans le sud d’Israël. Quarante autres participants ont été pris en otage.
Un record de violences de colons sur des Palestiniens en 2023
Les actes de violences de colons israéliens contre des Palestiniens en Cisjordanie occupée n’ont jamais été aussi nombreux en 2023 et ont fait au moins dix morts, a annoncé ce lundi l’ONG israélienne de défense des droits humains Yesh Din. «La violence des colons est la politique du gouvernement israélien», a dénoncé l’organisation dans un communiqué, précisant que le nombre d’incidents, leur gravité, «le nombre d’Israéliens impliqués et le bilan» des violences ont battu des records en 2023, surtout depuis le 7 octobre. «Les deux mois passés» depuis cette date «ont été particulièrement violents», a rapporté Yesh Din, qui a recensé 242 actes de violence.
Des dizaines d’habitations et de véhicules appartenant à des Palestiniens ont été endommagés par des colons en 2023, selon cette organisation qui comptabilise ces violences depuis 2006. L’agence des Nations unies chargée de la coordination humanitaire (Ocha) a recensé 1 225 attaques de colons sur des Palestiniens en 2023.
En Cisjordanie, territoire occupé depuis 1967 par Israël, 490 000 colons vivent au milieu de trois millions de Palestiniens. Ces colonies sont considérées comme illégales au regard du droit international.