Le porte-parole de l’armée israélienne Daniel Hagari a annoncé ce dimanche 20 octobre au soir que Tsahal allait «attaquer le pouvoir économique du Hezbollah pour endommager la confiance des combattants dans leur organisation». Tsahal entend ainsi «éviter que le Hezbollah puisse reconstituer ses forces après la guerre», a précisé un officier du renseignement israélien dans un briefing à la presse internationale.
L’Etat hébreu pense que le mouvement vit aujourd’hui grâce aux financements de l’Iran, environ 50 millions de dollars transférés tous les mois en grande partie via la Syrie. Ces échanges sont devenus plus difficiles, accroissant le rôle d’une des succursales du Hezbollah : l’association Qard al-Hassan, qui fournit les mêmes services qu’une banque commerciale.
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Reconstruction de biens civils détruits
Ces frappes, qui devraient commencer dans la nuit de ce dimanche à lundi, viseraient donc les unités du Hezbollah chargées de son système économique, ainsi que «toutes les branches de Qard al-Hassan», a confirmé l’officier du renseignement israélien. La banque, implantée un peu partout dans le pays malgré des sanctions américaines imposées en 2017, serait «un des mécanismes de contrôle d’une grande partie de la population chiite du Liban». C’est une perspective qui fait écho aux déclarations successives de responsables israéliens, dont le Premier ministre Benyamin Nétanyahou, et qui voudrait faire croire que le Hezbollah est un corps étranger au Liban.
Mais depuis la fin de la guerre civile, les anciennes milices devenues partis politiques se sont partagées le pouvoir mais aussi toute l’architecture étatique et économique du pays du Cèdre. La vie quotidienne des civils gravite autour de ces infrastructures qui, pour la plupart, sont implantées dans des quartiers civils densément peuplés. Dans leur vie quotidienne, la survie économique de nombreux Libanais est liée au système érigé par les partis milices libanais, le Hezbollah à sa tête. Au sortir de la guerre de 2006, ce dernier avait revendiqué une victoire, raffermi son mythe résistant dans le sud du Liban, et y avait financé la reconstruction de tous les biens civils détruits. Un horizon de reconstruction auquel des dizaines de milliers de déplacés du Liban se rattachent pour supporter la guerre d’aujourd’hui.
Reportage
Doctrine «Dahiya 2.0»
En annonçant cette escalade ahurissante en avance, Tsahal veut «clarifier que nous ne frappons pas des intérêts civils», selon l’officier du renseignement. Le porte-parole en arabe de Tsahal, Avichay Adraee, a averti les Libanais dimanche soir d’immédiatement «s’écarter des bâtiments utilisés par le Hezbollah de 500 mètres». Si le ciblage des banques de Qard al-Hassan a passé l’examen des juristes israéliens, il n’est pas sûr que ce soit l’avis du reste de la communauté internationale. Il semble au contraire se diriger vers une doctrine «Dahiya 2.0», comme celle utilisée en 2006 de manière contre-productive, prônant la non-distinction entre les cibles militaires et les cibles civiles, et le caractère disproportionné des opérations militaires pour affecter la base sympathisante du Hezbollah.