Sur les clichés publiés par sa famille, Eitan a les dents du bonheur et les yeux pleins de malice. Il pose avec sa petite sœur sur les genoux ou sur le siège d’une voiture pour enfant. Depuis samedi matin, ses proches n’ont plus aucune nouvelle du garçon de 12 ans et demi. Selon eux, le jeune Franco-Israélien, qui vit avec sa famille dans le kibboutz de Nir Oz, à moins de cinq kilomètres de la bande de Gaza, a été enlevé à moto par des hommes armés du Hamas.
Dans une interview à la chaîne de télévision i24News, sa tante raconte que le père d’Eitan a été blessé par des tirs alors qu’il tentait de protéger les siens. Les terroristes ont ensuite réussi à entrer dans l’abri où la famille était réfugiée. «Ils les ont pris et les ont mis sur des motos – ma belle-sœur et ses deux filles [âgées de 10 ans et un an] sur une, et Eitan sur l’autre. La première moto s’est arrêtée, mais la seconde a continué son chemin. Batsheva [sa belle-sœur] a pris la plus courageuse des décisions : elle a réussi à s’échapper avec ses deux filles, en pyjama et pieds nus.» Elle affirme depuis que son neveu, ainsi que son frère, Ohad, 49 ans, sont portés disparus.
Situation «inquiétante»
Le petit Eitan fait partie des nombreux ressortissants français dont le Quai d’Orsay a perdu la trace depuis le début des attaques perpétrées par le Hamas sur l’Etat hébreu. La France estime à 20 le nombre de compatriotes dont elle est sans nouvelles, a indiqué mardi soir la cheffe de la diplomatie, Catherine Colonna. Dans un communiqué publié plus tôt dans la journée, Paris précisait que leur situation est «considérée comme inquiétante». «Les informations dont nous disposons nous permettent de considérer comme très probable l’enlèvement de certains d’entre eux, dont un enfant mineur de douze ans», selon le ministère des Affaires étrangères, vraisemblablement en référence à Eitan. Quelque 200 otages, selon le journal Yedioth Aharonot, ont été kidnappés par le Hamas et le Jihad islamique, dont de nombreux étrangers.
Depuis samedi, le dispositif diplomatique français de crise – à Paris, Tel-Aviv et Jérusalem – a été en contact avec «plusieurs dizaines de compatriotes» à la recherche de leurs proches, qu’ils soient Français résidents ou de passage en Israël. Quelque 87 000 ressortissants français vivant en Israël sont enregistrés auprès des consulats à Tel-Aviv (62 000) ou à Jérusalem (25 000). Au moins huit ressortissants français sont décédés lors de l’attaque surprise sur Israël, dont un Franco-Israélien de 26 ans originaire de Bordeaux.
Véhicule criblé de balles
Le Quai d’Orsay s’est jusqu’à présent gardé de communiquer la moindre information sur ces personnes. Mais sur les plateaux télévisés, leurs proches multiplient les appels désespérés. Céline Ben-David Nagar, une Franco-Israélienne de 32 ans, mère d’un bébé de six mois, n’a plus donné signe de vie depuis samedi matin, alors qu’elle avait participé à la rave party qui a viré au cauchemar, à moins de six kilomètres de la frontière de Gaza, et où près de 260 corps sans vie ont été retrouvés. «Quand les sirènes ont retenti, elle a voulu faire demi-tour. Elle a dit à son mari [par téléphone, ndlr] que des soldats étaient arrivés pour les aider. Mais ce n’était pas des soldats, mais des combattants du Hamas qui leur ont tiré dessus», raconte son frère, en pleurs, interrogé par BFM TV. Le dernier message de Céline Ben-David Nagar date de 7 h 11. Son véhicule a été retrouvé criblé de balles. Son frère estime qu’il y a de «fortes, fortes chances qu’elle ait été enlevée». Sur la même chaîne d’information, son mari a tenu à lui laisser un message : «Céline, si tu vois ces images, ta fille Hélie est en bonne santé.»
L’identité d’une troisième personne disparue a été révélée par France 3. Un Franco-Israélien de 25 ans, originaire de Marseille et qui participait lui aussi à la soirée techno, n’a plus donné de nouvelles à ses proches depuis samedi. «Sa famille ne sait pas s’il est mort ou kidnappé», a déclaré Michel Cohen-Tenoudji, président du Consistoire israélite de Marseille. Peu d’informations ont filtré sur les autres victimes. Le parquet antiterroriste français, compétent en matière de crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis contre des Français à l’étranger, a indiqué à l’AFP être «en lien avec le Quai d’Orsay».