Certains espaces ne semblent pas appartenir au présent. L’ancien aéroport d’Atarot est un immense terrain vague, balayé par un vent si puissant qu’il courbe les quelques pins qui s’aventurent à pousser. Gris sont les restes de la piste d’envol qui traverse cette plaine au nord de Jérusalem. Gris sont les restes du terminal qui se dressent par-delà les herbes folles. Gris aussi sont les restes des tableaux de commande couverts de poussière. Difficile d’imaginer le passé, quand, dans les années 60, débarquait ici la fine fleur des dignitaires du nationalisme arabe alors triomphant, à bord des avions étincelants de la compagnie aérienne du royaume jordanien qui occupait Jérusalem. Difficile d’imaginer le futur alors que sur ce terrain vague pourrait se construire une colonie massive, à l’échelle d’une ville : plus de 9 000 logements, soit 50 000 personnes, destinés en priorité à la communauté juive ultraorthodoxe, dont les familles sont généralement nombreuses.
L’endroit est l’un des trois grands projets coloniaux, tous situés au-delà de la ligne verte, que le nouveau gouvernement israélien, en fonction depuis le mois de juin, a réactivé à Jérusalem – que l’Etat hébreu considère comme sa capitale. Chacun verrouille l’une des entrées de la ville et brise la continuité territoriale d’un éventuel Etat de Palestine, s’il venait à voir le jour.
Serpents de mer
Au nord, Atarot s’enfoncerait dans une zone à la démographie majoritairement arabe. Au sud, Givat Hamatos, plus modeste avec ses quelque 1 250