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Proche-Orient

La Cour suprême israélienne statue pour le maintien en poste du chef du Shin Bet jusqu’à «une décision ultérieure»

La plus haute juridiction israélienne a appelé mardi 8 avril le gouvernement et la procureure générale à trouver un «compromis créatif» autour du limogeage du patron de l’Agence de la sécurité intérieure, Ronen Bar. Le Premier ministre israélien a dans la foulée déploré une décision «étrange».
Ronen Bar avait été accusé par le Premier ministre israélien d’avoir enquêté sans son accord sur le ministre d’extrême droite Itamar Ben Gvir, chargé du portefeuille de la Sécurité nationale. (Gil-Cohen Magen/AFP)
publié le 9 avril 2025 à 9h23

Une décision de justice qui s’oppose aux velléités du Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou. Mardi 8 avril, dans la soirée, la Cour suprême israélienne a décidé que le chef du Shin Bet, Ronen Bar, resterait en poste «jusqu’à une décision ultérieure». Cette déclaration intervient après une longue audience consacrée à l’examen de plusieurs recours contestant le limogeage du chef de l’Agence de sécurité intérieure par le gouvernement. «Nous vous donnons jusqu’après Pessah [la Pâque juive, qui s’achève le 19 avril,] pour trouver un compromis créatif» avant que la Cour ne tranche, a également déclaré son président, le juge Yitzhak Amit, en renvoyant l’audience.

L’audience entamée mardi en début de matinée a d’abord été marquée par des altercations entre partisans et opposants du gouvernement qui ont conduit à l’expulsion du public de la salle, avant que les débats, retransmis en direct en vidéo, ne reprennent à huis clos.

Au risque de raviver les divisions d’une société israélienne très polarisée, le gouvernement du Premier ministre Benyamin Nétanyahou a décidé le 21 mars de limoger Ronen Bar, en qui le Premier ministre israélien dit avoir perdu toute confiance. Saisie de cinq recours dans les heures ayant suivi l’annonce de ce renvoi, la Cour en avait ordonné la suspension le jour même, décision qu’elle a confirmé mardi soir dans un arrêt. Ronen Bar pourra donc rester en poste, a décidé la Cour, autorisant le gouvernement à auditionner des candidats à sa succession mais interdisant toute «annonce de nomination».

Une décision «étrange» pour Nétanyahou

En réaction à cet arrêt de la Haute Cour, le Premier ministre israélien a qualifié cette décision «d’étrange», alors que le gouvernement avait initialement décidé de mettre un terme au mandat de Ronen Bar au plus tard le 10 avril.

Le limogeage du chef du Shin Bet est en revanche contesté par l’opposition, qui y voit le signe d’une dérive autocratique du pouvoir, et par la procureure générale de l’Etat. «La décision de mettre fin au mandat du chef du Shin Bet est fondamentalement viciée, entachée d’un conflit d’intérêts personnel du Premier ministre en raison des enquêtes criminelles concernant ses proches, et conduira» à politiser la fonction, a déclaré la procureure générale d’Israël, Gali Baharav-Miara, dans un communiqué publié vendredi en même temps que l’avis détaillé qu’elle a transmis à la Cour suprême. Benyamin Nétanyahou affirme pour sa part que le gouvernement peut décider à sa guise de nommer et renvoyer le chef du Shin Bet, à qui il reproche l’échec à empêcher l’attaque sanglante du mouvement islamiste palestinien Hamas ayant déclenché la guerre en cours, le 7 octobre 2023.

Dans une lettre à la Cour suprême, Ronen Bar estime, lui, que les raisons de son licenciement sont plus liées au fait qu’il a tenu tête au Premier ministre israélien plutôt qu’à ses compétences. Il accuse aussi Nétanyahou d’avoir cherché à l’utiliser pour retarder son propre procès en corruption, ce que le chef d’Etat a qualifié de «mensonges».

Tomer Naor, du Mouvement pour la probité du pouvoir, qui a déposé un des recours, a déclaré en marge de l’audience que son association avait demandé à la cour de «rappeler que Ronen Bar est le chef du Shin Bet et responsable de l’enquête sur le Qatargate», une affaire dans laquelle sont impliqués des proches de Nétanyahou.