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Enquête

L’ambassade de France à Bagdad, la famille spoliée et le silence de Paris : plongée au cœur d’une «affaire de biens juifs»

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Les ayants droit de la famille Lawee, réfugiée depuis trois générations au Canada, poursuivent l’Etat français, dont la représentation permanente se trouve depuis des décennies dans les murs de leur maison spoliée dans les années 1960 par le régime irakien.

La demeure spoliée de la famille Lawee, construite sur un terrain au bord du Tigre, à Bagdad. Avec ses colonnades néoclassiques, sa pelouse manucurée et sa piscine, elle tient autant du palace oriental que du manoir hollywoodien. (Archives de la famille Lawee)
ParGuillaume Gendron
Ancien journaliste à Libération
Emmanuel Fansten
Publié le 11/06/2025 à 12h00

Il fut un temps, pas si lointain, où Bagdad était une des capitales du monde juif. En 1937, Ezra et Khedouri Lawee se distinguent par leur opulence parmi leurs 150 000 coreligionnaires vivant alors en Irak. Les deux frères, qui possèdent la concession General Motors pour tout un pan du Moyen-Orient, font construire sur un terrain au bord du Tigre une vaste demeure, symbole de leur statut, pour y loger leurs familles respectives. Avec ses colonnades néoclassiques, sa pelouse manucurée et sa piscine, Beit Lawee («la maison des Lawee», en hébreu) tient autant du palace oriental que du manoir hollywoodien. Mais les soubresauts de l’histoire viendront bientôt briser le rêve irakien des Lawee, les jetant sur les routes de l’exil, comme tout le reste de la communauté juive du pays, aux racines remontant pourtant à l’ère babylonienne.

De ce monde englouti ressort aujourd’hui une affaire au symbolisme potentiellement explosif pour la France : les Lawee, qui ont trouvé refuge au Canada il y a trois générations, demandent compensation pour la spoliation de leur bien. Une requête qui n’est pas adressée aux autorités irakiennes mais à l’Etat français : Beit Lawee est, en effet, depuis plus de soixante ans, l’ambassade de France à Bagdad.

L’homme qui porte ce combat s’exprime dans un franç