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Réintégration

Les enfants de jihadistes rapatriés de Syrie ne «posent aucune difficulté particulière»

Olivier Christen, procureur antiterroriste, constate que les enfants des Français partis soutenir l’Etat islamique en Syrie et réintégrés dans l’Hexagone s’intègrent et ne représentent pas de risque.
Le camps d'Al-Hol, en Syrie, le 27 janvier. (Delil Souleiman /AFP)
par Elliot Morlong
publié le 11 septembre 2024 à 15h31

Les 364 enfants de jihadistes rapatriés de Syrie «ne posent aujourd’hui aucune difficulté particulière». C’est ce qu’a affirmé sur Franceinfo, mercredi 11 septembre, le procureur du Parquet national antiterroriste Olivier Christen. Emmenés par leurs parents ou directement nés sur place, ces filles et fils de jihadistes français étaient détenus dans des camps au Kurdistan syrien en attendant d’être rapatriés. Après des condamnations pour inaction par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) et le Comité contre la torture de l’ONU, l’Elysée avait fini par récupérer progressivement ses ressortissants. Une décision que le gouvernement tardait à prendre par peur des critiques et des conséquences pour sa popularité.

Face à l’hostilité de l’opinion publique, la France a opté jusqu’en 2022 pour des méthodes de rapatriement ciblé, à savoir le retour d’enfants orphelins ou de quelques mineurs dont les mères avaient accepté de renoncer à leurs droits parentaux. Mais l’Elysée a finalement mis fin à cette politique du «cas par cas», face aux critiques des institutions internationales. Olivier Christen résume que «170 femmes» issues de la zone irako-syrienne «sont revenues sur le territoire» français dont «57 rapatriées dans les opérations» organisées ces dernières années. Pour autant, des organismes français continuent de blâmer le gouvernement, qui refuse de rapatrier les derniers Français présents dans les camps.

«Suivi appuyé»

Le procureur précise qu’aujourd’hui ces enfants sont répartis dans 59 départements. «Ils font l’objet d’une coordination par mon parquet afin de s’assurer que la prise en charge est optimale», a-t-il déclaré. Interrogé sur le commentaire de François Molins – ex-procureur de Paris en charge du terrorisme pendant les attentats de 2015 – qui craignait en 2018 que ces mineurs soient des «bombes à retardement», il a répondu que «ces 364 enfants ne [lui] paraissent pas aujourd’hui du tout répondre à cette expression». «Ils font l’objet d’un suivi appuyé, a-t-il poursuivi. Il y a des situations très variables, certains enfants sont très très jeunes, d’autres sont des grands adolescents.» De plus, il fait la distinction avec les mineurs mis en cause de manière croissante en 2023 et 2024 dans des affaires de terrorisme en France, car ces derniers vivent avec leur famille et n’ont jamais quitté le territoire français. «On ne parle pas des mêmes personnes», a-t-il insisté.

Sur les 364 mineurs revenus depuis 2015, «169 ont été rapatriés depuis deux ans» dans les opérations menées dans les camps d’Al-Hol et Roj. L’année dernière, Libération avait enquêté sur le processus difficile d’intégration de ces enfants et sur les difficultés auxquelles devait faire face l’Aide sociale à l’enfance. Ils souffrent tous de stress post-traumatique, se retrouvent séparés de leurs frères et sœurs et éloignés de leurs parents incarcérés. Les périodes d’attente avant d’être remis à leur famille restée en France ou à des familles d’accueil peuvent durer plusieurs années. Malgré un état de santé physique et psychologique critique et des conditions d’intégration dures, les éducateurs soulignaient la capacité d’adaptation des enfants et leur volonté d’apprendre.