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Libération
Droits humains

Migrations : plus de 230 000 Afghans ont quitté l’Iran en juin, la plupart expulsés

Sommés par Téhéran de quitter son sol avant le 6 juillet, les réfugiés sont contraints de retraverser la frontière. Ce retour dans leur pays d’origine, touché par l’une des pires crises humanitaires mondiales, ne leur laisse que peu de perspectives.
Des réfugiés afghans expulsés d'Iran arrivent au poste-frontière d'Islam Qala, entre l'Afghanistan et l'Iran, le 28 juin. (Wakil Kohsar/AFP)
publié le 30 juin 2025 à 10h55

Quatre millions «d’Afghans illégaux» résident sur le sol iranien selon Téhéran. La république islamique a été leur terre d’accueil après quatre décennies de guerre en Afghanistan et le retour au pouvoir des Talibans. Mais l’Iran, qui tolérait jusque-là leur présence, mène depuis l’année dernière – bien avant le début de la guerre avec Israël – l’une de ses plus vastes campagnes d’expulsion de réfugiés. Le régime, sous sanctions internationales et en pleine crise économique, accuse les Afghans de faire monter le chômage et la criminalité, et leur a donné jusqu’au dimanche 6 juillet pour quitter son territoire. Conséquence : au mois de juin, plus de 230 000 personnes sont rentrées en Afghanistan. La grande majorité a été expulsée par les autorités iraniennes, rapporte ce lundi 30 juin l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).

Du 1er au 28 juin, 233 941 Afghans ont traversé la frontière, rapporte le porte-parole de l’agence onusienne, Avand Azeez Agha, ajoutant que durant la seule semaine du 21 au 28 juin, l’OIM a recensé 131 912 retours. Cette même semaine, certaines journées ont vu à elles seules plus de 30 000 retours, assure l’OIM – un chiffre désormais retombé entre 6 000 et 7 000 par jour, rapporte l’ONU et les autorités talibanes, mais qui risque de remonter à l’approche du 6 juillet. Au total, depuis le début de l’année, «691 049 Afghans sont revenus d’Iran, dont 70 % ont subi des retours forcés», a-t-il ajouté.

Crise humanitaire

Sans grand capital et avec des perspectives d’emploi maigres en Afghanistan, ces migrants de retour redoutent de plonger un peu plus dans la pauvreté. La situation des droits humains est également catastrophique dans le pays. «L’Afghanistan reste le seul pays au monde où les filles ne peuvent accéder à une éducation au-delà du niveau primaire», assurait aussi en juin 2024 la haute-commissaire adjointe des Nations unies aux droits de l’homme, Nada al-Nashif.

Bien que désormais en paix, l’Afghanistan rencontre l’une des pires crises humanitaires mondiales, avec un tiers des 45 millions d’habitants qui souffrent de la faim, selon l’ONU. Pourtant, depuis que Washington a gelé la distribution de l’aide internationale, l’ONU et les ONG sont à la peine. L’OIM, par exemple, «n’a pu aider que 3 % des migrants de retour certains jours de forts passages à Islam Qala», rapporte-t-elle.

Accueil compliqué en Afghanistan

De leur côté, les autorités de Kaboul, reconnues par aucun pays au monde et privées de fait d’une grande part de l’aide internationale, peinent à accueillir ces millions de réfugiés. Le ministre des Affaires étrangères du gouvernement taliban, Amir Khan Muttaqi, a récemment réclamé à l’ambassadeur iranien Alireza Bigdeli «un mécanisme coordonné pour un retour graduel des migrants».

Expulsés depuis l’ouest, les Afghans sont aussi chassés depuis l’est par le Pakistan qui, englué dans un marasme politique et économique, accuse également ces migrants de tous les maux. Au total, depuis fin 2023 et la première campagne d’expulsions de masse du Pakistan, plus d’un million d’Afghans ont dû partir de ce pays, et plus du double ont quitté l’Iran – pour moitié des enfants, d’après l’ONU.