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Libération
Interview

«Ni le Hamas ni l’Autorité palestinienne ne veulent d’une escalade»

Ofer Zalzberg, de l’Institut Kelman pour la transformation des conflits, explique pourquoi, malgré les violences de mardi, la situation ne devrait pas s’envenimer.
Manifestation le long de la frontière avec Israël à l'est de la ville de Gaza, le 5 avril 2023. (Mahmud Hams /AFP)
publié le 5 avril 2023 à 20h28

Alors que la police israélienne a arrêté environ 350 jeunes Palestiniens qui s’étaient retranchés dans la nuit de mardi à mercredi dans la mosquée Al-Aqsa, à Jérusalem, Ofer Zalzberg, directeur du programme Moyen Orient à l’Institut Kelman pour la transformation des conflits, estime que le risque d’embrasement reste, pour l’instant au moins, contenu.

Qui sont ces jeunes Palestiniens qui s’étaient barricadés dans la mosquée Al-Aqsa ?

Certains sont liés à des organisations comme le Fatah ou le Hamas, mais pas tous. Comme beaucoup de Palestiniens, ils pensent que c’est leur devoir de défendre au nom des musulmans la mosquée Al-Aqsa de toute incursion étrangère. Et comme aussi beaucoup de Palestiniens, ils nient qu’il y a jamais eu un temple à cet emplacement [le temple d’Hérode, détruit par les Romains en l’an 70, ndlr] et que donc, tout attachement juif à ce site est illégitime. Cela illustre le manque de communication entre les deux communautés.

Comment le Hamas et l’Autorité palestinienne vont-ils réagir ?

Pour l’instant, les deux se sont limités à des condamnations rhétoriques. Le Jihad islamique a tiré des roquettes depuis Gaza, mais le Hamas ne l’a pas imité, pour l’instant en tout cas. Il faudra surveiller comment cela évolue dans les prochains jours. Israël va interdire l’accès à l’esplanade aux non-musulmans pour les dix derniers jours du Ramadan, cela pourrait permettre d’éviter une escalade que ni le Hamas ni l’Autorité palestinienne ne semblent vouloir.

Pourquoi n’en veulent-ils pas ?

Le Hamas ne souhaite pas affaiblir les accords actuels avec Israël qui assurent qu’une amélioration de la sécurité entraîne un allègement des restrictions aux postes-frontières de Gaza pour la circulation de marchandises, et dans une certaine mesure, des habitants. Une escalade majeure des tensions empêcherait toute reconstruction économique de la bande de Gaza. L’Autorité palestinienne ne veut pas non plus d’une escalade majeure qui mettrait en danger les discussions avec Israël qui ont débuté à Aqaba fin février et se sont poursuivies à Charm el-Cheikh le 19 mars.

Le nouveau gouvernement israélien ne risque-t-il pas, lui, de provoquer une escalade ?

Il y a deux dynamiques parallèles en son sein. La majorité du gouvernement, dont le Premier ministre, Benyamin Nétanyahou, et le ministre de la Défense, Yoav Galant, tentent d’empêcher que la situation dégénère. Mais d’autres, menés par le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir, demandent des représailles contre Gaza et des groupes palestiniens à Jérusalem. Je ne pense pas qu’ils seront suivis. Mais si Ben Gvir se rend effectivement sur l’esplanade des Mosquées dans les prochains jours, comme il a annoncé qu’il le ferait, cela déclenchera des tensions particulièrement dangereuses.