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Libération
Guerre Hamas-Israël

«On entend des coups de feu partout» : des soignants témoignent du chaos dans l’hôpital Al-Shifa de Gaza

La chaîne qatarie Al-Jazeera relaie ce mercredi 15 novembre les récits de membres du personnel du complexe médical, attaqué par l’armée israélienne, qui assure de son côté avancer «doucement et précautionneusement».
A l'intérieur de l'hôpital Al-Shifa hospital following après une frappe israélienne à Gaza-City, le mercredi 15 novembre 2023. (Gaza Ministry Of Health/REUTERS)
publié le 15 novembre 2023 à 15h13

«La situation est de plus en plus tendue. Depuis mardi soir, il y a des tirs, des bombardements et des attaques en permanence. Ce sont des moments totalement effrayants, horribles pour les familles, les civils qui s’abritent dans l’hôpital avec leurs enfants, pour le personnel qui s’occupe des patients et pour les patients eux-mêmes.» Dans un enregistrement diffusé ce mercredi 15 novembre par la chaîne qatarie Al-Jazeera, une des seules à continuer à informer en direct de la bande de Gaza depuis la reprise de la guerre avec Israël, le docteur Ahmed El Mokhallalati raconte la détresse des occupants de l’hôpital Al-Shifa, plus vaste complexe sanitaire de l’enclave palestinienne. Assiégé depuis plusieurs jours par l’armée israélienne, le site a fait l’objet ce mercredi d’une «opération ciblée et de précision contre le Hamas dans un secteur spécifique» selon les termes de Tsahal (l’acronyme de l’armée israélienne), qui accuse le mouvement islamiste d’y dissimuler certaines de ses infrastructures stratégiques.

Auprès de l’AFP, le vice-ministre de la Santé du gouvernement du Hamas à Gaza, Youssef Abou Rich, qui affirme se trouver également sur les lieux, décrit la présence de «dizaines de soldats et de commandos aux urgences et à la réception» et de «chars dans le complexe de l’hôpital». Les Nations unies estiment qu’Al-Shifa accueille quelque 2 300 personnes, parmi lesquelles des malades et des blessés mais aussi des centaines de déplacés qui pensaient trouver refuge dans l’hôpital, en théorie protégé par le droit international.

650 patients en attente d’une évacuation

«La situation est terrifiante, on entend des coups de feu partout dans le périmètre de l’hôpital», relate à son tour Omar Zaqout, un employé du service des urgences, également cité par Al-Jazeera. Selon son témoignage, les militaires ont «arrêté et brutalisé certains des hommes qui s’étaient réfugiés à l’hôpital» et une partie des détenus ont été emmenés «nus et les yeux bandés». «Ils n’ont pas apporté d’aide ni de fournitures médicales, seulement la terreur et la mort», ajoute-t-il. Tsahal avait affirmé avoir livré ces dernières heures du matériel médical, notamment des couveuses pour les nourrissons prématurés, à l’hôpital Al-Shifa.

Comme les autres hôpitaux de la bande de terre, le site est étranglé depuis plus d’un mois par le siège imposé par Israël, qui empêche l’acheminement de carburant, d’eau et de médicaments et autres éléments indispensables à son fonctionnement. Avec la perspective de combats dans l’enceinte même du complexe médical, le pronostic vital des blessés se trouve d’autant plus menacé. Au total, 650 patients de l’hôpital Al-Shifa, dont 22 en soins intensifs, auraient besoin d’une évacuation en urgence, a affirmé ce mercredi Mohammed Zaqout, le directeur général des hôpitaux de la bande de Gaza, lors d’une conférence de presse organisée à Khan Younès, dans le sud de l’enclave. En outre, 36 nourrissons prématurés et personnes placées sous assistance respiratoire seraient également en situation de «danger total», a-t-il ajouté.

Un responsable de l’ONU «horrifié»

Critiquée par plusieurs organisations internationales, à l’instar de l’ONU dont un responsable s’est dit «horrifié» par l’attaque en cours, l’armée israélienne assure pour sa part que «la bataille n’a pas lieu à l’intérieur de l’hôpital». «Des tirs ont été échangés à l’entrée du complexe, et les terroristes ont été neutralisés, a affirmé un haut gradé israélien lors d’un briefing militaire à la mi-journée. Mais, pour le moment, nous ne combattons pas à l’intérieur. Nous avançons doucement et précautionneusement, sur la base de renseignements, en contact direct avec le personnel médical, et en évitant toutes les frictions possibles avec les patients.»