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Libération
Tensions

Palestine : la chaîne Al Jazeera suspendue, sur fond d’affrontements dans les territoires

L’administration des territoires palestiniens, gérée par l’Autorité palestinienne, accuse la chaîne qatarie d’«incitation à la sédition», d’«ingérence» et de «désinformation». L’ONU demande l’annulation de cette décision.

Un employé d'Al Jazeera dans les locaux de la chaîne à Jérusalem, le 31 juillet 2017. (Ahmad Gharabli/AFP)
Publié le 02/01/2025 à 11h01, mis à jour le 02/01/2025 à 15h55

Une victime collatérale des affrontements en cours entre partisans du Fatah, du Hamas et du Jihad islamique. L’Autorité palestinienne a décidé mercredi 1er janvier de suspendre la diffusion et les activités de la chaîne qatarie Al Jazeera dans les territoires palestiniens, l’accusant de «diffuser des contenus et reportages caractérisés par de la désinformation», d’«incitation à la sédition» et d’«ingérence» dans ses affaires. «Le comité ministériel compétent, composé des ministères de la Culture, de l’Intérieur et des Communications, a décidé de suspendre la diffusion et de geler toutes les activités de la chaîne Al Jazeera et de son bureau en Palestine, ainsi que de suspendre temporairement le travail de tous les journalistes, employés, équipes et chaînes affiliées jusqu’à ce que son statut juridique soit rectifié», rapporte l’agence de presse officielle Wafa.

Un employé de la chaîne en Cisjordanie occupée a confirmé que le bureau de à Ramallah avait été notifié le jour même de sa suspension. Parallèlement, une vidéo datée du 1er janvier attestant de la remise d’un document judiciaire officiel aux journalistes, par les policiers, a été publiée par le journal.

Ce jeudi après-midi, le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme a demandé ce jeudi l’annulation de la décision de l’Autorité palestinienne de suspendre la diffusion et les activités de la chaîne qatarie Al Jazeera dans les Territoires palestiniens. «Nous sommes profondément préoccupés» et «nous demandons instamment à l’Autorité palestinienne de faire marche arrière et de respecter ses obligations en matière de droit international», a souligné le Haut-Commissariat sur X.

Déjà la semaine dernière, Al Jazeera avait dénoncé une «campagne» du Fatah de Mahmoud Abbas à son encontre en Cisjordanie occupée. «Cette campagne fait suite à la couverture faite par la chaîne des affrontements entre les forces de sécurité et la résistance armée à Jénine», avait expliqué la chaîne qatarie, qui défendait la neutralité de son travail.

Depuis quelques semaines, des affrontements opposent le Fatah à des groupes, dont la plupart sont des membres du mouvement islamiste Hamas et du Jihad islamique, qui se considèrent plus efficaces que le pouvoir en place pour lutter contre Israël. Une dizaine de morts a déjà été comptabilisée.

Al Jazeera défendu par le Hamas et le Jihad islamique

Le Hamas, grand rival du Fatah, a qualifié la décision de suspendre Al Jazeera de «violation flagrante de la liberté de la presse» et d’«acte répressif destiné à faire taire les voix dissonantes». «Cette décision s’inscrit dans la lignée d’une récente série de mesures arbitraires prises par l’Autorité pour entraver les droits et libertés publics, et renforcer son emprise sécuritaire sur le peuple palestinien», a déploré le mouvement dans un communiqué, appelant l’Autorité palestinienne à «revenir immédiatement sur sa décision».

Le Jihad islamique, autre groupe palestinien armé, a aussi protesté contre l’interdiction d’Al Jazeera par l’Autorité palestinienne. «Nous condamnons la décision des autorités de fermer le bureau d’Al Jazeera en Palestine, alors que notre peuple et notre cause ont un besoin urgent de faire connaître leurs souffrances au monde entier», a déclaré dans un communiqué l’organisation ayant participé à l’attaque du 7 octobre 2023 en Israël.

Israël avait déjà décidé en mai dernier d’interdire la diffusion d’Al Jazeera dans le pays et d’y fermer ses bureaux. Le résultat d’un conflit de longue date entre la chaîne et le gouvernement du Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, qui s’est aggravé pendant la guerre en cours dans la bande de Gaza depuis près de quinze mois. L’armée israélienne a accusé à plusieurs reprises les journalistes d’Al Jazeera d’être des «agents terroristes» à Gaza en étant affiliés au Hamas, auteur de l’attaque sans précédent du 7 octobre 2023 en Israël.

Mise à jour : à 15h55, avec l’ajout de la déclaration du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme.