C’est la fin d’un calvaire de quarante-huit jours. Treize otages, enlevés le 7 octobre lors de l’attaque meurtrière du Hamas dans le sud d’Israël, ont été libérés ce vendredi après-midi dans le cadre de l’accord officialisé mercredi entre l’Etat hébreu et l’organisation islamiste et sont enfin sortis de Gaza. 13 femmes et enfants échangés contre 39 prisonniers palestiniens grâce à la trêve qui a commencé en début de matinée dans l’enclave palestinienne, assiégée depuis plus de six semaines par Israël.
Yaffa Adar, 85 ans
La famille de Yaffa Adar avait découvert, horrifiée, son enlèvement par le Hamas, en la reconnaissant sur une vidéo diffusée après l’attaque du kibboutz de Nir Oz. Les images de la vieille dame, âgée de 85 ans, emmitouflée dans une couverture rose à bord d’une voiturette de golf en direction de Gaza, avaient fait le tour du monde. Elle apparaissait tête haute, menton levé. «Vous pouvez voir qu’elle est assise et qu’elle essaie de leur montrer qu’elle n’a pas peur, qu’elle n’est pas blessée. Vous savez, s’ils veulent la prendre, ils la prendront avec sa fierté», avait témoigné Adva Adar, une de ses petites-filles, au micro de BFM. Yaffa Ada est une femme passionnée de lecture et d’écriture, qui aime tellement «l’odeur du papier» qu’elle a toujours refusé que ses proches lui offrent une liseuse électronique, raconte sa petite-fille au Times of Israel. Sa grand-mère n’a en revanche jamais boudé l’utilisation des réseaux sociaux, grâce auxquels elle restait en contact avec ses trois enfants, huit petits-enfants et sept arrière-petits-enfants, à qui elle envoyait joyeusement messages et GIF animés. Dans un autre article du Times of Israel, Adva Adar s’inquiétait que sa grand-mère, israélienne et ne disposant pas d’une autre nationalité, ne puisse bénéficier de la pression exercée par les pays étrangers. «Elle est née dans ce pays, elle l’a construit de ses deux mains, et il n’est pas possible que cela ne suffise pas à la libérer de sa captivité.» «Elle était vraiment le ciment de notre famille, insiste encore sa petite-fille. Elle aimait la vie.» Libérée ce vendredi 24 novembre, elle va désormais pouvoir retrouver les siens.
Amelia Aloni, 5 ans, et sa mère Danielle Aloni, 44 ans
Famille déplorant le plus d’otages du Hamas, les Aloni voient enfin deux de leurs membres libérées. La jeune Amelia et sa mère Danielle avaient été enlevées, elles aussi, au kibboutz de Nir Oz avec sept autres membres de leur famille. «Ma sœur est une personne au grand cœur, très généreuse, qui essaie toujours d’aider, avait témoigné Moran Aloni, le frère de Danielle, au quotidien israélien Haaretz. Elle aime le yoga et est très drôle.» Il avait décrit sa nièce, Amelia, comme heureuse et intelligente, quand le collectif Bring Our People Home la présente comme passionnée de puzzles et de photographie. La matinée de l’attaque du Hamas, la mère célibataire et sa fille, habitant Yavneh, étaient en vacances chez la sœur de Danielle et Moran, Sharon Aloni Cunio (34 ans), son mari David Cunio (33 ans) et leurs jumelles de 3 ans, Emma et Yuli. Depuis, leur famille n’avait plus de nouvelles d’eux. Jusqu’au 30 octobre, où Danielle est apparue auprès de deux captives dans une vidéo devenue virale publiée par le Hamas. Son père, Ramos Aloni, avait exprimé son «soulagement de la voir, de savoir qu’elle est vivante». Assise sur une chaise de jardin en plastique, elle accusait Benyamin Nétanyahou de les avoir abandonnées et l’appelait à procéder à un échange de prisonniers avec le Hamas pour obtenir leur libération. C’est aujourd’hui chose faite.
Aviv Katz Asher, 2 ans, sa sœur Raz, 4 ans, et leur mère, Doron Katz Asher, 34 ans
Doron Katz Asher, 34 ans, et ses deux filles, Aviv et Raz, âgées respectivement de 2 et 4 ans, font partie des plus de 70 personnes enlevées le 7 octobre dans le kibboutz Nir Oz, à environ deux kilomètres de la clôture de la bande de Gaza. Les trois Israélo-Allemandes se trouvaient alors chez le père de Doron Katz Asher, Gadi Moses, où elles passaient le week-end pour la fête de Soukkot. L’agronome, âgé de 80 ans, a lui aussi été kidnappé alors qu’il tentait de discuter avec les terroristes du Hamas. Le corps sans vie de sa conjointe, Efrat Katz, aurait pour sa part été retrouvé plusieurs jours plus tard, selon le quotidien israélien The Times of Israel. Depuis un abri, Doron téléphone à son mari, Yoni. «Elle essayait de rassurer les filles, elle jouait avec elles», racontait le 10 octobre à Libération la belle-sœur de Doron, Yarden Greenfeld. «Et puis plus rien, on a suivi la géolocalisation de son téléphone. On l’a vu se déplacer, jusqu’à Khan Younès», dans le sud de la bande de Gaza. Elle se souvenait aussi d’une vidéo publiée sur les réseaux sociaux du Hamas : «Doron serre Aviv dans ses bras, et Efrat embrasse Raz ; elles sont fourguées dans un pick-up. Il y a des hommes partout autour d’elles, ils crient Allah akbar. Et le pick-up démarre.» Son frère, Doron Katz, a également été capturé par le Hamas le 7 octobre.
Hannah Katzir, 77 ans
«Nous avons exprimé notre volonté de la libérer pour des raisons humanitaires, mais les atermoiements d’Israël ont mené à son décès», disait le Jihad islamique cette semaine. Mais Hannah Katzir est finalement bien vivante, et désormais libre. Fille de rescapés de la Shoah, elle est originaire du kibboutz Ein Carmel, dans le nord d’Israël. Ses proches décrivent une femme «chaleureuse, généreuse et gentille», une grand-mère qui offrait volontiers des bonbons aux enfants du kibboutz de Nir Oz où elle s’était installée. C’est là qu’elle a été enlevée le 7 octobre. Elle était avec son mari, avec qui elle formait un couple amoureux, très uni. Mais elle ne le retrouvera pas : Rami est mort ce jour-là. Restent ses filles Carmit et Avital qui ne lui ont plus parlé depuis que son téléphone s’est éteint, à 8h44 ce samedi noir d’octobre. Ses filles qui devaient commencer à faire leur deuil avant de voir revenir cette mère miraculée. On sait qu’Hannah, dont la santé n’est pas bonne, a été enlevée sans son déambulateur, conduite à pied jusqu’à la frontière de Gaza, filmée en chaussettes et pyjama avant d’être embarquée sur une moto. Son fils Elad, également à Nir Oz, a aussi disparu ce jour-là, peut-être otage du Hamas et désormais séparé de sa mère.
Margalit Moses, 78 ans
Le site du Forum des familles d’otages et de disparus décrit Margalit Moses comme une «grand-mère dévouée». La professeure retraitée a trois enfants et huit petits-enfants. A 78 ans, cette «amoureuse de la nature» passionnée d’ornithologie aime la randonnée et le tricot. L’Israélienne a beaucoup voyagé dans son pays mais aussi à l’étranger. Le 7 octobre, elle a été enlevée à son domicile, où elle vivait seule, dans le kibboutz de Nir Oz, dont son frère aîné Chanon Cohen est l’un des fondateurs. A la chaîne américaine CBS, ce dernier a déclaré avoir vu sa sœur sur un clip vidéo en train d’être emmenée hors de sa maison par le Hamas. Une autre vidéo la montre emmenée à Gaza sur un scooter. «Je suis très inquiet, je pleure intérieurement», confiait Chanon Cohen, évoquant les sérieux problèmes de santé de sa sœur. Sa famille avait annoncé qu’elle avait quotidiennement besoin de médicaments et de soins. L’ex-mari de Margalit et père de ses enfants, Gadi Moses, un agronome réputé qui vit dans le même kibboutz, a également été enlevé le 7 octobre.
Adina Moshe, 72 ans
Adina Moshe a été enlevée dans le kibboutz de Nir Oz, qu’elle avait aidé à construire. Ce 7 octobre, au matin, David, l’époux de cette Israélienne de 72 ans, est abattu par les membres du Hamas alors qu’il tente de la protéger. Adina Moshe est de son côté tirée par la fenêtre de la pièce blindée dans laquelle elle était réfugiée et amenée à moto, entre deux terroristes, vers la bande de Gaza. «Elle devait s’accrocher au terroriste qui a tué son mari pour ne pas tomber, avait expliqué sa petite-fille au quotidien israélien The Times of Israel. Nous ne savons pas si elle est vivante ou morte.» La maison du couple a été retrouvée calcinée, des impacts de balles sur les murs. La famille d’Adina Moshe avait alerté à plusieurs reprises sur son état de santé. Opérée du cœur l’année dernière, la septuagénaire se trouvait dans la bande de Gaza sans ses médicaments. Avant d’être kidnappée, l’Israélienne avait travaillé pendant des années comme nourrice auprès des résidents de son kibboutz, où elle avait aussi rencontré, au bord de la piscine, celui qui deviendra son époux. «Ils étaient tellement amoureux qu’on n’imagine pas à quel point ils l’étaient», a témoigné leur petite-fille. Selon elle, sa grand-mère disait toujours que si des terroristes étaient amenés à venir chez elle, elle leur ferait du thé et sortirait des biscuits.
Ohad Munder Zichri, 9 ans, sa mère Keren Munder, 54 ans, et sa grand-mère Ruth Munder, 78 ans
Fils unique, amateur de tennis, de foot et de Rubik’s Cube, Ohad a été enlevé alors qu’il rendait visite à ses grands-parents, Ruth et Avraham Munder, en compagnie de sa mère Keren. Tous les quatre ont été capturés. Selon l’agence de presse JNS, Ohad, qui a fêté son neuvième anniversaire en captivité, est un fan du club de football Hapoël Beer-Sheva, basé dans la ville éponyme, dans le sud du pays. Keren, sa mère, est coach de volleyball à l’école élémentaire El-Harizi de Tel-Aviv. Dans les galeries de portraits des otages, sa grand-mère Ruth, adepte de peinture et de tricot, apparait toujours souriante, visage entouré de boucles argentées, lunettes papillons sur le nez. Libérés ce vendredi, les trois membres de la famille vont retrouver leurs proches. Mais aussi se confronter au deuil et à l’absence. Le frère de Keren, Roy, a été assassiné le 7 octobre. Et son père, Avraham, 78 ans, le mari de Ruth, demeure otage à Gaza.
Channah Peri, 79 ans
Ayelet Svatitzky a reçu les dernières images de sa mère, Channah Peri, et de son frère, Nadav Popplewell, le 7 octobre. On les voyait tous les deux, assis sans bouger, sur un canapé. La photo, signée «Hamas», avait été envoyée depuis le téléphone de sa mère. Quelques minutes plus tôt, à peine sortie du lit, Ayelet Svatitzky avait allumé son téléphone et découvert des messages par dizaines sur ses conversations WhatsApp. On y parlait d’une invasion du Hamas dans le Kibboutz de Nirim, où vit sa famille. Ayelet a aussitôt appelé sa mère : «Je lui ai dit de s’enfermer dans une zone sécurisée, de s’y enfermer et de n’ouvrir sous aucun prétexte», racontait-elle il y a quelques jours à la BBC. Trop tard : «Au téléphone, j’ai entendu des gens parler en anglais avec un accent arabe. J’ai compris que les terroristes étaient arrivés.» La photo confirmera la prise d’otages de Channa et Nadav, tous deux diabétiques. A la tête de l’épicerie locale puis couturière, Channah Peri vivait à Nirim depuis les années 60. Amatrice de jardinage et de Tai Chi, elle va pouvoir renouer avec les parties de Rummikub avec ses petits-enfants. Nadav, lui, reste détenu à Gaza. Le troisième enfant de Channa, Roy, âgé de 54 ans, a été tué lors de l’attaque du Hamas.