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Libération
Décryptage

Reconnaissance de la Palestine par la France : ce que l’on sait de l’annonce historique d’Emmanuel Macron

Après le Canada, le Royaume-Uni, l’Australie et le Portugal, la France reconnaîtra officiellement l’Etat de Palestine ce lundi 22 septembre à 21h00, heure française, à l’Assemblée générale des Nations unies.

Emmanuel Macron lors de l'Assemblée générale des Nations unies à New York, le 25 septembre 2024. (Jeenah Moon/Bloomberg. Getty Images)
Publié le 22/09/2025 à 7h04

C’est un geste à la fois historique et hautement symbolique. Alors que la guerre continue de faire rage dans la bande de Gaza, la France s’apprête à reconnaître officiellement l’Etat palestinien ce lundi 22 septembre, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies à New York. Cette décision, prise dans le cadre d’un sommet coparrainé par la France et l’Arabie Saoudite, vise à soutenir la solution à deux Etats et à donner un nouvel élan diplomatique à un processus de paix en profonde difficulté.

Quand et comment Emmanuel Macron va-t-il reconnaître l’Etat de Palestine ?

Le président français doit annoncer officiellement la reconnaissance de l’Etat de Palestine par la France ce 22 septembre, au premier jour de la semaine de haut niveau de la 80e Assemblée générale de l’ONU à New York, où environ 140 chefs d’Etat et de gouvernement sont attendus. Cette déclaration interviendra dans le cadre d’un sommet international qu’Emmanuel Macron coprésidera avec le prince héritier d’Arabie Saoudite, Mohammed ben Salmane, qui s’exprimera en visioconférence, destiné à relancer la solution à deux Etats – israélien et palestinien – vivant côte à côte dans des frontières sûres et reconnues.

Ce geste s’inscrit dans la continuité de la «déclaration de New York», adoptée le 12 septembre par 142 Etats membres sur 193, qui réaffirmait la perspective d’un Etat palestinien viable et souverain, tout en excluant explicitement le Hamas du processus diplomatique et en appelant à un cessez-le-feu immédiat à Gaza ainsi qu’à la libération des otages. Le discours d’Emmanuel Macron devant l’Assemblée générale des Nations unies est prévu vers 15 heures (heure locale), soit 21 heures à Paris.

Quels sont les pays qui se sont aussi engagés à reconnaître l’Etat palestinien ?

Outre la France, neuf autres pays occidentaux ont annoncé qu’ils envisageaient de reconnaître officiellement l’Etat de Palestine lors de cette séquence diplomatique : Andorre, l’Australie, la Belgique, le Canada, le Luxembourg, Malte, le Portugal, le Royaume-Uni et Saint-Marin.

Dimanche, le Canada est ainsi devenu le premier pays du G7 à franchir le pas, suivi de près par l’Australie et le Royaume-Uni. Dans une vidéo de plus de six minutes publiée sur les réseaux sociaux, le Premier ministre britannique, Keir Starmer, a expliqué sa décision, affirmant vouloir «raviver l’espoir de paix et d’une solution à deux Etats» entre Israéliens et Palestiniens, tout en annonçant qu’il sanctionnera des responsables du Hamas «dans les semaines à venir». Plus tard dans la journée, le Portugal a annoncé sa reconnaissance officielle à son tour .

Combien de pays reconnaissent aujourd’hui l’Etat de Palestine ?

Depuis la proclamation de son indépendance en 1988, l’Etat de Palestine a été reconnu près de 150 pays, dont la Chine et la Russie, soit près de 75 % des 193 Etats membres de l’ONU. Depuis le début de l’offensive israélienne meurtrière dans la bande de Gaza, en représailles aux attaques terroristes du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, la guerre a incité de nombreux pays à entériner officiellement son statut d’Etat : l’Arménie et la Slovénie en juin 2024, ainsi que l’Espagne, la Norvège et l’Irlande un mois plus tôt.

Avec la reconnaissance de la France et du Royaume-Uni, seuls les Etats-Unis, soutiens indéfectibles d’Israël, continuent de s’opposer à cette démarche parmi les membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. Leur droit de veto reste ainsi le dernier obstacle à l’adhésion de la Palestine en tant qu’Etat membre à part entière de l’ONU.

Pourquoi cette initiative française intervient-elle à ce moment-là ?

Cette annonce survient dans un contexte régional extrêmement tendu. Depuis le 7 octobre 2023, l’offensive israélienne dans la bande de Gaza a plongé la population dans une crise humanitaire sans précédent, tandis que la colonisation en Cisjordanie et les menaces d’annexions de territoires palestiniens continuent d’aggraver le conflit.

C’est dans l’avion qui le ramenait d’Al-Arich, l’avant-poste égyptien du soutien humanitaire à Gaza, qu’Emmanuel Macron avait annoncé sur X, en avril, son intention de reconnaître la Palestine. Initialement prévue pour le 17 juin, cette mesure avait néanmoins été reportée en raison de l’escalade militaire entre Israël et l’Iran. Depuis, le locataire de l’Elysée a constamment réaffirmé sa «détermination» à reconnaître la Palestine, évoquant un «devoir moral». Cette intention s’est concrétisée le 24 juillet, lorsqu’il a adressé une lettre officielle au président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, annonçant que la France «procédera à la pleine reconnaissance de la Palestine comme Etat» lors de l’Assemblée générale de l’ONU, soulignant la nécessité de «faire avancer la paix au Proche-Orient». Cet engagement a été réitéré auprès du dirigeant palestinien le 19 septembre, quelques jours avant l’annonce officielle à New York.

Quelle est la portée juridique et diplomatique d’une telle reconnaissance ?

La reconnaissance d’un Etat palestinien par la France est un acte souverain de politique étrangère, qui ne nécessite ni vote ni procédure particulière à l’ONU. Sur le plan juridique, elle n’accorde pas automatiquement à la Palestine le statut de membre à part entière de l’organisation, qui reste soumis à l’adhésion de l’Assemblée générale et à l’approbation du Conseil de sécurité.

Sur le plan diplomatique, cette démarche est la «meilleure manière d’isoler le Hamas», veut croire Emmanuel Macron, affirmant vouloir «travailler» avec le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou. Ce geste reste néanmoins avant tout symbolique et n’aura pas d’impact direct sur le terrain à Gaza, sauf si elle s’accompagne de sanctions à l’encontre d’Israël.

Comment a réagi Israël ?

Israël a réagi avec vigueur à l’annonce d’Emmanuel Macron. En août, Benyamin Nétanyahou avait accusé le président français de «nourrir l’antisémitisme» et de servir les intérêts du Hamas. Dimanche, toujours furieux, le dirigeant israélien a réaffirmé que la création d’un Etat palestinien mettrait «en danger [notre] existence» et constituerait «une récompense absurde pour le terrorisme». Il doit prendre la parole en personne vendredi 26 septembre devant l’Assemblée générale des Nations unies.