«L’Espagne est préparée pour reconnaître l’Etat palestinien.» Devant les députés, ce mercredi 10 avril, le Premier ministre, Pedro Sánchez, a confirmé sa volonté d’accorder un statut diplomatique de plein droit à la Palestine, et poursuit ses efforts pour rallier à cette idée d’autres pays de l’Union européenne. «La communauté internationale ne pourra pas aider l’Etat palestinien si elle ne reconnaît pas son existence», a déclaré le chef du gouvernement, tout en dénonçant la «réponse disproportionnée» d’Israël dans la bande de Gaza.
Sánchez vuelve a defender la solución de dos estados entre Israel y Palestina y afirma que «afortunadamente la mayoría de países han abierto los ojos»: «No se podrá ayudar a Palestina si no reconoce su existencia. España está preparada para reconocer el estado palestino». pic.twitter.com/bJrHHv16nK
— THE OBJECTIVE (@TheObjective_es) April 10, 2024
La date de cette décision relevant de «l’intérêt géopolitique de l’Europe» n’est pas précisée, mais Sánchez avait évoqué comme échéance souhaitable la fin du mois de juin, lors d’une rencontre informelle avec des journalistes, la semaine dernière, en marge d’une tournée au Moyen-Orient.
Une tournée en Europe
Le sujet a été abordé lors des récentes visites en Jordanie, en Arabie Saoudite et au Qatar. Et il le sera encore à partir de jeudi, lors d’une nouvelle tournée de Pedro Sánchez en Pologne, en Norvège, en Irlande et en Slovénie. La semaine prochaine, il a prévu de recevoir à Madrid son homologue portugais Luís Montenegro, récemment nommé, pour parler encore une fois de la «nécessité d’avancer vers la reconnaissance de la Palestine», a indiqué mardi la porte-parole du gouvernement espagnol, Pilar Alegría.
Madrid est en effet l’une des capitales européennes les plus critiques vis-à-vis d’Israël depuis le début du conflit à Gaza. Fin mars, en marge d’un sommet européen à Bruxelles, Pedro Sánchez avait publié une déclaration commune avec ses homologues irlandais, maltais et slovène dans laquelle les dirigeants se disaient «prêts à reconnaître la Palestine», dans la mesure où cela pourra «apporter une contribution positive» à la résolution du conflit israélo-palestinien.
Une résolution des députés dès 2014
La reconnaissance d’un Etat palestinien par l’Espagne n’est pas un débat nouveau, issu des suites du 7 Octobre. Une résolution dans ce sens avait été adoptée en novembre 2014, sous le gouvernement conservateur dirigé par Mariano Rajoy. Bien que soutenue par l’ensemble des forces politiques de l’époque, elle n’avait pas été suivie d’effet, faute de consensus européen sur le sujet. Le Partido popular, alors au pouvoir, s’est par la suite régulièrement déclaré partisan d’une solution à deux Etats. Ce qu’a confirmé ce mercredi l’actuel chef de file de la formation, Alberto Núñez Feijóo.
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Le statut de la Palestine est même l’unique point d’accord entre gouvernement et opposition, lancés depuis plusieurs mois dans une surenchère d’attaques sur une multitude de sujets : amnistie des indépendantistes catalans, gestion de la pandémie, affaires de corruption, mémoire historique… De l’avis des observateurs, le niveau de violence verbale actuel est inédit depuis le retour à la démocratie, en 1977.
Dans l’Union européenne, neuf pays accordent un statut d’Etat indépendant, avec accueil d’un ambassadeur, à la Palestine. Huit d’entre eux, la République tchèque, la Slovaquie, la Hongrie, la Pologne, la Bulgarie, la Roumanie, Malte et Chypre, avaient pris cette initiative avant de rejoindre l’Union. Seule la Suède, où réside une importante communauté palestinienne, l’a fait en tant qu’Etat membre, en 2014. D’après l’Autorité palestinienne, 137 pays des 193 Etats siégeant à l’ONU ont reconnu l’Etat palestinien. D’autres pays, dont l’Espagne et la France, accueillent une «mission de Palestine» sur leur sol, qui n’a pas le rang d’ambassade.
Hausse de la dépense militaire
Selon l’ancien directeur général du ministère israélien des Affaires étrangères, Alon Liel, une reconnaissance par l’Espagne d’un Etat palestinien pourrait «déclencher une dynamique» et «déboucher sur une reconnaissance globale par l’Europe et les Nations Unies». Dans une note publiée mardi par l’Institut Royal Elcano, un centre de réflexion basé à Madrid, ce diplomate a ajouté que Madrid deviendrait alors, selon lui, «un acteur significatif dans le cadre d’un nouvel élan diplomatique dans le conflit israélo-palestinien».
Pedro Sánchez a aussi annoncé ce mercredi une hausse de la dépense militaire, liée aux risques d’internationalisation des conflits en cours, à Gaza comme en Ukraine. «Pour dissuader ceux qui ne partagent pas le projet de paix et de démocratie qu’est l’Europe, nous devrons renforcer nos industries de la sécurité et de la défense», a annoncé le Premier ministre, en avançant un chiffre choc : «L’UE présente un déficit d’investissement dans la Défense de 56 milliards d’euros.» Les partenaires des socialistes dans le gouvernement, les partis de gauche radicale Sumar et Unidas Podemos, ont déjà manifesté leur désaccord.