La diffusion par l’Iran des «aveux» d’espionnage de deux Français arrêtés dans le pays est «une mise en scène indigne, révoltante, inacceptable et contraire au droit international», a réagi jeudi le ministère français des Affaires étrangères. «Cette mascarade révèle le mépris de la dignité humaine qui caractérise les autorités iraniennes», ajoute le Quai d’Orsay dans une déclaration, réclamant la «libération immédiate» des deux Français, identifiés comme Cécile Kohler et Jacques Paris.
«Préparer les conditions de la révolution»
Le site de la chaîne arabophone al-Alam de la télévision officielle iranienne a diffusé jeudi ce qu’elle présente comme des «aveux» d’espionnage de deux Français arrêtés en mai en Iran. Dans la vidéo, une jeune femme s’exprimant en français affirme s’appeler Cécile Kohler et être agent de renseignement opérationnel à la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE). Une source syndicale française les avait identifiés comme Cécile Kohler, une responsable du syndicat d’enseignants Fnec FP-FO, et son conjoint Jacques Paris. Elle précisait qu’ils faisaient du tourisme en Iran pendant les vacances de Pâques au moment de leur arrestation.
Dans l’enregistrement diffusé jeudi, la femme affirme qu’elle et son conjoint étaient en Iran «pour préparer les conditions de la révolution et du renversement du régime iranien». Ils devaient, toujours d’après ses déclarations, financer des grèves et des manifestations et même utiliser des armes «si nécessaire pour se battre contre la police». Selon l’homme montré dans la vidéo, qui s’exprime aussi en français, l’ objectif de la DGSE est de «faire pression sur le gouvernement» iranien.
#Iran’s state TV has produced a documentary about two French nationals recently arrested by Iranian Intelligence Ministry. Part of the documentary shows the two saying they work for #France’s foreign intelligence agency (DGSE) & that they came to support protests & regime change. pic.twitter.com/L6DRZEdZDA
— Abas Aslani (@AbasAslani) October 6, 2022
Une dizaine d’Occidentaux retenus en Iran
Téhéran avait arrêté les deux Français le 11 mai pour être «entrés dans le pays dans le but de déclencher le chaos et déstabiliser la société», et les a ensuite accusés début juillet d’«atteinte à la sûreté» du pays. Les autorités françaises avaient alors dénoncé une arrestation «sans fondement» et demandé leur «libération immédiate».
Cette diffusion survient sur fond d’une vague de manifestations en Iran déclenchées le 16 septembre par la mort d’une jeune femme, Mahsa Amini, après son arrestation par la police des mœurs. Les autorités iraniennes avaient déjà déclaré l’arrestation de ressortissants étrangers «neuf ressortissants d’Allemagne, de Pologne, d’Italie, de France, des Pays-Bas, de Suède, etc.» accusés d’avoir été «sur les lieux d’émeutes ou y ont été mêlés».
Plus d’une dizaine de ressortissants de pays occidentaux, binationaux pour la plupart, sont détenus ou bloqués en Iran, ce que des ONG condamnent comme une politique de prise d’otages pour obtenir des concessions des puissances étrangères. Parmi elles, figurent la chercheuse franco iranienne Fariba Adelkhah, arrêtée en juin 2019 puis condamnée à cinq ans de prison pour «atteinte à la sécurité nationale», ce que ses proches ont toujours farouchement nié, ainsi que Benjamin Brière, arrêté en mai 2020 et condamné à huit ans et huit mois d’emprisonnement pour espionnage, ce qu’il conteste également.