C’est une liste macabre qui avait été transmise par le Hamas, et gardée confidentielle par le gouvernement israélien. En annonçant ce mardi 18 février les noms des six derniers otages israéliens vivants qui devraient être libérés samedi dans le cadre de la première phase de trêve, le Forum des familles d’otages a implicitement donné les noms des huit otages présumés morts pendant leur captivité à Gaza. Sur les 14 otages restants (sur 33 libérables), le Hamas avait déclaré fin janvier que huit d’entre eux étaient morts – une information alors confirmée par le porte-parole du gouvernement israélien, sans donner le nom des otages morts.
Quatre premiers corps seront rapatriés jeudi 20 février, dont les trois restants de la famille Bibas, ainsi qu’Oded Lifshitz, a fait savoir le Hamas ce mercredi 19 février, ce qui permettra de confirmer définitivement l’identité des otages. Le bureau du Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a confirmé qu’un accord avait été conclu pour assurer la libération de six otages vivants samedi, de quatre otages décédés jeudi et de quatre autres corps la semaine prochaine, mais il s’est abstenu de nommer l’un d’entre eux. Il devrait s’agir du Franco-Israélien Ohad Yahalomi, d’Itzik Elgarat, de Shlomo Mansour et de Tsachi Idan.
Libération dresse le portrait de ces enfants, femme et hommes présumés morts durant leur captivité.
Ohad Yahalomi, Franco-Israélien
Il s’agit du deuxième otage franco-israélien. Ohad Yahalomi, alors âgé de 48 ans, a été enlevé le 7 octobre 2023 dans sa maison du kibboutz Nir Oz. Son fils Eitan, 12 ans, libéré le 27 novembre 2023 lors de la première trêve, avait été enlevé séparément. Sa femme, Bat-Sheva, a raconté que toute la famille avait tenté de se réfugier dans le mamad, la pièce sécurisée de leur maison. Mais la porte ne fermant pas, Ohad s’était posté devant avec un pistolet. Il aurait alors été blessé dans un échange de tirs, selon le journal Times of Israel. Il aurait reçu une balle dans la jambe au moment de l’attaque avant d’être enlevé.
Ohad Yahalomi avait été annoncé mort en janvier 2024 dans une vidéo diffusée par un groupe allié du Hamas, mais cette information n’a jamais été confirmée par l’armée israélienne. Lundi 20 janvier 2025, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a souligné que Paris avait pesé pour que les deux otages franco-israéliens, Ofer Kalderon et Ohad Yahalomi, fassent partie des 33 otages libérables dans les quarante jours qui viennent. En revanche, «aucune nouvelle concernant leur état de santé et leurs conditions de détention.» Emmanuel Macron s’était entretenu samedi 18 janvier 2025 avec les familles des deux otages.
Si Ofer Kalderon a retrouvé la liberté durant cette phase d’échange d’otages, le 1er février 2025, Ohad Yahalomi serait donc bel et bien mort. Amoureux de la nature et des grands espaces, Ohad Yahalomi était employé de l’Autorité des parcs et de la nature. Il était un spécialiste des scorpions, sur lesquels il a écrit un guide.
Kfir, Ariel et Shiri Bibas
Cette famille israélo-argentine vivait au kibboutz Nir Oz lorsque le Hamas a déclenché l’attaque terroriste le 7 Octobre. Situé à la frontière gazaouie, le village d’alors 400 habitants avait payé un lourd tribut ce jour-là, avec une trentaine de morts et plus de 70 otages. Les parents de Shiri, qui vivaient également à Nir Oz, avaient disparu dans l’incendie de leur maison, avant que leurs corps ne soient retrouvés et identifiés le 21 octobre. Le reste de la famille, lui, a été enlevé. Le père de famille, Yarden Bibas, a été libéré le 1er février 2025. Quant à Kfir, 9 mois lors de son enlèvement, Ariel, 4 ans à l’époque, et leur mère Shiri, 32 ans en 2023, le Hamas a annoncé ce 18 février le rapatriement de leurs corps en Israël pour le jeudi 20 février. Leur profil complet est à retrouver ici.
Oded Lifshitz
Oded Lifshitz, 83 ans lors de son enlèvement, et sa femme, Yocheved, font partie des fondateurs du kibboutz dans lequel ils vivaient, à Nir Oz. Le couple a été kidnappé chez eux le 7 Octobre, mais Yocheved a été rapidement relâchée le 23 octobre 2023. A l’époque, elle est la première et la seule à raconter sa captivité, du «cauchemar» de son enlèvement à la «courtoisie» de ses geôliers. Oded et sa femme militaient tous deux pour la paix et transportaient régulièrement des patients de Gaza pour qu’ils reçoivent des soins médicaux dans les hôpitaux israéliens, plus performants. Ancien journaliste, Oded, était un fervent défenseur des droits de l’homme. Il a écrit pendant de nombreuses années pour Al Hamishmar, un quotidien qui milite pour la paix au Moyen-Orient.
Le Hamas a déclaré ce mercredi que le corps de l’octogénaire devrait faire partie des quatre dépouilles qui seront remises jeudi aux autorités israéliennes.
Itzik Elgarat
Cet Israélo-Danois a été enlevé chez lui, au kibboutz Nir Oz. Le matin du 7 Octobre, vers 11h30, Itzik, 69 ans, appelle son frère, Dani, pour l’avertir que sa main avait été gravement blessée alors qu’il tentait de fermer la porte de sa pièce sécurisée. Dani a rapporté avoir entendu des coups de feu de l’autre côté du fil, et son frère crier «Dani, c’est fini.» Certains otages libérés en novembre 2023 lors de la première trêve affirment que Itzik a été soigné pour sa blessure à l’hôpital Nasser de Khan Younès avant d’être emmené dans les tunnels. En mars 2024, le Hamas a annoncé que sept otages avaient été tués dans un bombardement, dont Itzik, mais l’armée israélienne ne l’a jamais confirmé et a toujours considéré Itzik comme un otage vivant.
Shlomo Mansour
Né en Irak, il était le plus vieil otage détenu par Israël, à 85 ans. Son épouse, Mazal Mansour, avec qui il était marié depuis soixante ans, avait réussi à échapper au Hamas le 7 Octobre dans leur kibboutz Kissoufim. Le père de cinq enfants avait survécu, en 1941, au Farhoud, une émeute antisémite à Bagdad. Le 11 février 2025, des représentants de Tsahal ont confirmé que Shlomo Mansour, pourtant toujours sur la liste des otages retenus à Gaza, avait en réalité été «assassiné par l’organisation terroriste du Hamas le 7 octobre 2023». «La décision de confirmer son décès a été prise sur la base de renseignements collectés au cours des derniers mois», avait précisé le communiqué militaire.
Tsachi Idan
«J’ai besoin que le gouvernement ramène Tsachi vivant. Il a été enlevé vivant. Il doit être ramené vivant», implorait, en août 2024, sa femme Gali Idan. Enlevé le 7 Octobre alors qu’il se trouvait chez lui, dans le kibboutz de Nahal Oz, ce père de famille de 49 ans était ingénieur en informatique. Lors du massacre perpétré par le Hamas dans le kibboutz, sa fille de 18 ans, Maayan, est abattue à travers la porte de leur pièce sécurisée, où la famille, composée de quatre enfants, s’était réfugiée le matin même. L’attaque, entièrement filmée par les terroristes et diffusée en direct sur Facebook, a duré plusieurs heures durant lesquelles la famille était mise en joue.
La mère de Tsachi, Devorah Idan, partageait en juin 2024 avoir «vu ce qu’il se passait. Nous avons regardé pendant des heures. Nous avons vu les enfants pleurer, demander aux terroristes pourquoi ils avaient tué leur sœur.» Le père a ensuite été enlevé, les mains couvertes du sang de sa fille, avec un autre habitant du kibboutz, Omri Miran, qui ne figure pas sur la liste des 33 otages devant être libérés ces prochaines semaines. Si ce dernier est apparu dans une vidéo diffusée le 27 avril 2024 par le Hamas, Tsachi Idan, lui, n’a plus jamais donné de signes de vie. Sa femme Gali a affirmé qu’au moment de l’attaque, leur fille cadette, Yaël, a supplié les terroristes de ne pas emmener son père, et de ne pas le tuer. «Ils se sont retournés et ont dit : «Il reviendra, il reviendra.» Ils ont promis à Yaël qu’il reviendrait.»
Mise à jour : ce mercredi 19 février à 18h45, avec l’annonce du Hamas de la remise du corps d’Oded Lifshitz jeudi, en plus de ceux des trois membres de la famille Bibas.