Depuis treize nuits, le chercheur français Victor Dupont, 27 ans, et une amie franco-tunisienne dorment en prison. La justice militaire tunisienne accuse le premier d’«atteinte à la sûreté de l’Etat». Les motifs de l’arrestation de sa camarade ne sont pas connus. Samedi 19 octobre, le doctorant en sociologie s’apprête à passer un week-end avec trois amis quand des policiers en civil les interpellent à Tunis. Victor Dupont est plaqué au mur assez brutalement. Ils sont enfermés plusieurs heures dans des voitures banalisées au pied de l’appartement du jeune homme, avant qu’un juge d’instruction et la police scientifique n’arrivent sur place. Dans l’après-midi, ils sont interrogés au siège de la police judiciaire à El Gorjani. «On m’a demandé le nom de ma mère, quand j’étais arrivé en Tunisie et quand je repartais, mon programme et comment je connaissais Victor. C’est tout», raconte André (1), un des amis du chercheur.
Dans la soirée, seul le contractuel à l’Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans (Iremam) est placé en garde à vue. Ses amis contactent aussitôt l’ambassade de France à Tunis, qui leur conseille de trouver un avocat. Celui-ci leur apprend lundi 21 octobre que Victor Dupont a été déféré au tribunal militaire du Kef, une région rurale du nord-ouest de la Tunisie. Il s’agit de la juridiction militaire la plus proche de Jendouba, terrain d’étude du chercheur, où il retrace les parcours socioprofessionnels de travailleurs et chômeurs