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Archéologie

«Une pièce vendue nourrit ma famille pendant une semaine» : en Syrie, le fléau des fouilles clandestines

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Après quatorze ans de guerre, le patrimoine antique devient une source de revenus dans le pays, extrêmement pauvre. Dans la province méridionale de Deraa, moins contrôlée, les habitants déterrent les trésors romains et byzantins.

A Nawa, en Syrie, le 29 mai 2025. (Ed Ram/Getty Images. AFP)
Par
Mohamed Errami
correspondance à Damas (Syrie)
Publié aujourd'hui à 8h00

A l’aube, dans une oliveraie poussiéreuse aux abords de Nawa (sud de la Syrie), des silhouettes s’agenouillent. Leurs mains creusent la terre sèche avec un outil bricolé : un bâton prolongé d’un fil de cuivre et d’un morceau de charbon. Le silence est seulement brisé par le bruit discret des pelles. Ces hommes ne cherchent ni eau ni or, mais les restes d’un passé millénaire : pièces romaines, fragments byzantins, poteries – tout ce qui peut se revendre.

«Je fais ça parce qu’il n’y a pas de travail, souffle Ahmad, 32 ans, le visage couvert de poussière. Avant, on creusait la nuit, en cachette, pour éviter que les soldats nous attrapent. Aujourd’hui, on le fait en plein jour, personne ne vient nous arrêter.» Depuis cinq mois, il creuse le même trou, espérant tomber sur un objet assez précieux pour payer ses dettes.

Dans la province de Deraa, berceau de la révolte syrienne de 2011, les ruines romaines affleurent sous les oliviers. Temples, citernes et mosaïques témoignent d’un âge d’or oublié. Cet ancien carrefour cananéen a vu se succéder Romains et Byzantins, notamment sous l’empereur Hadrien qui favorisa la région en y développant routes et cités administratives. Aujourd’hui, il ne reste de ce