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Libération
Escarmouche commerciale

Pour résister aux voitures électriques chinoises, l’UE menace de renforcer ses barrières douanières

La Commission européenne a menacé ce mercredi 12 juin d’imposer à partir de juillet des droits de douane supplémentaires sur les véhicules électriques chinois, en raison de subventions déloyales dont bénéficieraient les constructeurs de ce pays.
Une voiture électrique Huawei AITO à Pékin, le 1er juin 2024. (Cfoto/NurPhoto via AFP)
publié le 12 juin 2024 à 19h27

Après les européennes, la voiture électrise cette fois les relations diplomatiques sino-européennes. Après neuf mois d’enquête, la Commission européenne a évoqué ce mercredi 12 juin la possibilité d’instaurer des «droits compensateurs provisoires» sur les voitures chinoises, et ce, dans moins d’un mois, selon un communiqué. Autrement dit, elle menace d’instaurer des droits de douane supplémentaires sur les importations de véhicules électriques en provenance de Chine, accusant Pékin d’avoir favorisé illégalement ses constructeurs automobiles.

Les véhicules fabriqués dans les usines chinoises étaient jusqu’ici taxés à hauteur de 10 %. Bruxelles prévoit notamment d’augmenter ces droits à 17,4 % pour la marque BYD, 20 % pour Geely et 38,1 % pour la firme SAIC. Le montant imposé différera en fonction des niveaux de subventions publiques perçus par les entreprises, mais devrait s’établir à une moyenne de 21 %.

La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, avait annoncé l’ouverture d’une enquête antisubventions en septembre 2023. «Dans le cadre de son enquête en cours, la Commission a provisoirement conclu que la chaîne de valeur des véhicules électriques à batterie en Chine bénéficiait de subventions déloyales, ce qui représente une menace de préjudice économique pour les producteurs de l’UE», a expliqué l’exécutif européen. «Notre objectif n’est pas de fermer le marché de l’UE aux véhicules électriques chinois, mais de veiller à ce que la concurrence soit loyale», a commenté sur X le commissaire européen au Commerce, Valdis Dombrovskis.

Toutefois, la Commission ouvre également la porte à un dialogue, en affirmant que ces droits de douane «ne seraient perçus que si des droits définitifs sont institués». Les taux provisoires ont été communiqués aux différentes entreprises concernées et aux autorités chinoises pour «étudier les moyens de résoudre les problèmes recensés», a-t-elle expliqué. «Si les discussions avec les autorités chinoises n’aboutissaient pas à une solution efficace, ces droits compensateurs provisoires seraient introduits à partir du 4 juillet» affirme-t-elle.

Un horizon auquel se refuse le gouvernement allemand, alors que les constructeurs d’Outre-Rhin sont très engagés en Chine. Le ministre allemand des Transports, le libéral Volker Wissing, a alerté dans la foulée de l’annonce de la Commission sur ce qu’il estime être le risque d’une «guerre commerciale» avec Pékin. Ces taxes «frappent les entreprises allemandes et leurs produits d’excellence», a-t-il déploré dans un message sur X ajoutant que «c’est par une concurrence accrue, des marchés ouverts et de meilleures conditions d’implantation dans l’UE que les véhicules doivent devenir moins chers, et non par une guerre commerciale et un cloisonnement des marchés».

L’Allemagne a bataillé avec la Suède et la Hongrie pour éviter des sanctions contre les constructeurs chinois, craignant des représailles. La France et l’Espagne ont au contraire poussé pour des mesures ciblées et proportionnées.

«Nuisible»

Bruxelles aura quatre mois, après l’institution de droits provisoires, pour imposer des droits définitifs. Mais les pays membres pourront les écarter si au moins 15 d’entre eux, représentant au moins 65 % de la population de l’UE, s’y opposent. Un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères avait prévenu ce mercredi matin, avant même l’annonce de Bruxelles, qu’une taxation des véhicules fabriqués en Chine serait «nuisible» aux intérêts européens, dénonçant une attitude protectionniste.

Aux Etats-Unis, le président Joe Biden avait annoncé le 14 mai une hausse des droits de douane sur les véhicules électriques chinois à 100 %, contre 25 % précédemment. Comme Washington, l’Union européenne cherche à protéger son industrie face à une concurrence jugée déloyale de la filière automobile chinoise qui a pris de l’avance dans les technologies de batteries.