Funérailles pour le dernier poilu, deuil pour tous les autres. De la guerre de 14, il n'en restait plus qu'un et c'était lui. Lazare Ponticelli a fait grand bruit quand il s'est éteint mercredi dernier à 110 ans. Hier, c'était minute de silence dans les administrations et drapeaux en berne sur les bâtiments publics. Et aux Invalides, des obsèques dignes d'un grand homme. Pourtant, Lazare les voulait «sans tapage ni grand défilé». L'homme qui avait servi au 4e régiment de marche du 1er étranger, une unité de la Légion composée en grande majorité de garibaldiens, souhaitait surtout qu'on se souvienne du sacrifice de tous les autres.
Les autres, leurs familles. A l'église des Invalides, derrière un gros cordon, ceux qui n'ont pas d'invitations. René, 54 ans, brandit une photographie. C'est celle de son grand-père, Paul Javoy, d'Olivet (Loiret) qui s'en est tiré parce qu'une balle a «ricoché sur sa redingote». Sur l'image jaunie, Paul est en sabots et tient un long râteau. René a les larmes aux yeux. Il dit : «J'ai ramené sa photo pour qu'il participe.» René parle d'une page d'histoire qui se «vit en direct». A côté de lui, Denise, la petite fille de François Ravaud, mort en 1915 sans avoir «jamais eu de sépulture». On ne l'a pas retrouvé. «Mon père est mort à 96 ans, il a vécu sans père tout le temps. Il a passé toute sa vie sans comprendre.» A René, Denise explique tout le mal que produit ce deuil impossible : «On le porte en soi apr