Quand la faillite de la banque américaine Lehman Brothers a fait dévisser les Bourses, lundi, Sotheby's, qui vendait à Londres les oeuvres de l'artiste britannique Damien Hirst, court-circuitant les galeries en un geste sans précédent, a été prise d'un frisson. La réponse ne s'est pas fait attendre. Les lots de la première séance - les plus prestigieux - ont pulvérisé les estimations. Le Veau d'or est parti à 13 millions d'euros, un record pour l'auteur. Son requin-marteau, 12 millions. Le lendemain, après plus de 220 pièces vendues, le compteur affichait 140 millions d'euros. Tout dans la poche de Hirst (1) : jamais un artiste n'a accumulé ainsi pareille fortune.
La presse avait pourtant été quasi-unanime pour annoncer un échec, proclamant même Hirst fini, bientôt plongé dans le formol. Beaucoup ne faisaient que relayer l'amertume des marchands devant cette vente directe, du producteur au consommateur. Outre que sa production doit garder une certaine force pour soutenir un tel événement dans une conjoncture économique défavorable, la vente a démontré de manière éclatante la mondialisation de l'art. Indifférents à la foule de curieux, 620 enchérisseurs, sur place, se battaient avec les cinquante plus fortunés, en ligne au téléphone.
Un tableau de mouches crevées n'a pas trouvé preneur et plusieurs prix sont restés en dessous de la ligne de flottaison, mais le tout fait choc. Durant les onze journées d'exposition, 21 000 visiteurs se sont pressés. 1 300 ont acheté le cat