Un débat raté ne chassera pas la xénophobie nationaliste comme un mauvais rêve. La calamiteuse prestation de Marine Le Pen face à Emmanuel Macron a ouvert les yeux d’un certain nombre d’électeurs, qui ont pu constater de visu que le FN avait un programme incohérent et intolérant, où l’agressivité populiste tenait lieu de raisonnement.
Depuis, comme plusieurs fois dans son histoire, le parti lepéniste est entré en crise. Les uns veulent poursuivre sur la ligne nationale-sociale de Florian Philippot, qui voit dans l’Union européenne la source de tous les maux français. Les autres veulent revenir au discours ultradroitier et traditionaliste naguère employé par Jean-Marie Le Pen et dont sa petite-nièce Marion Maréchal fut un temps la porte-parole, quitte à mettre en sourdine la rhétorique anti-euro qui inquiète les électeurs.
Cette division, ou cette hésitation, peut coûter cher au Front, dont les militants ne savent plus très bien à quel diable se vouer.
Mais cela ne change rien aux causes profondes qui expliquent la force du FN. Sous la surface tumultueuse de la vie du parti, elles sont toujours à l’œuvre. Fracture sociale, désagrégation urbaine, angoisse identitaire, chômage de masse : tous les ingrédients de la mauvaise soupe brune sont toujours réunis. A cela s’ajoute la lancinante propagande des élus et des intellectuels qui annoncent la dissolution de la France dans le magma supposé de la mondialisation, et qui apportent, volontairement ou non, un stock inépuisable d’arguments à la litanie frontiste.
La politique libérale menée par le gouvernement Philippe permettra-t-elle de rasséréner la société française ? Rien n’est moins sûr. Elle plaît aux élites économiques mais risque fort de mécontenter rapidement les classes populaires. C’est-à-dire cette partie de l’électorat français où le FN puise l’essentiel de sa force.