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Pour Philippot, l’humiliation ou l’exil

Le souverainiste, jugé trop «gauchiste» au FN, ne pourrait garder sa place qu’au prix de lourdes concessions. Son départ acterait un retour du parti d'extrême droite à son ADN identitaire.
Florian Philippot à Lyon, le 29 novembre 2014. (Photo Bruno Amsellem. Libération)
publié le 19 septembre 2017 à 19h06

Rentrer dans le rang ou s'affranchir. Acculé par la dirigeante du FN à quitter la présidence de son association Les Patriotes pour «lever toute ambiguïté», Florian Philippot est devant un choix cornélien. Continuer sur sa lancée, à savoir refuser d'accéder à la demande de sa patronne et assumer une bonne fois pour toutes son indépendance vis-à-vis de la ligne officielle du Front, au risque de s'en exclure, ou courber le dos et accepter l'humiliation d'un violent recadrage, mais donner l'image d'un vice-président soumis au bon vouloir du chef et aux critiques de ses adversaires. Ce qui reviendrait par là même à acter sa marginalisation au sein du parti.

Bruit. Jusqu'à présent, Marine Le Pen avait toujours défendu celui qui fut son plus proche conseiller face à la frange «droitière» du parti, irritée par une ligne «philippotiste» symbole pour elle d'inacceptables renoncements avec l'ADN frontiste. Mais entre-temps, le FN a perdu une présidentielle et échoué à constituer un groupe à l'Assemblée. Plusieurs cadres et militants attribuent depuis à Philippot et aux sujets qu'il incarne - la sortie de l'euro et la question sociale - la responsabilité de cette séquence électorale ratée. Indice d'un basculement de la balance en sa défaveur, cet été, Florian Philippot n'a pu sauver la tête de son alliée Sophie Montel, débarquée de la présidence du groupe FN en région Bourgogne-Franche-Comté, sur décision de Marine Le Pen.

Depuis, le flingue s'est tourné vers la «tempe» du vice-président du parti, a dénoncé l'intéressé. En bureau politique, lundi, Marine Le Pen n'a rien fait d'autre que promettre à Philippot qu'il serait renvoyé du Front s'il persistait avec ses Patriotes, sans que l'homme ne change de position pour autant. L'eurodéputé chercherait-il à se faire virer du FN ? Si certains interprètent son obstination comme un rapport de force visant à le remettre en cour, d'autres y voient surtout une preuve de fébrilité alors que le parti est en pleine refondation et promet l'émergence de nouveaux visages pour incarner le FN de demain. En se laissant exclure du parti, Florian Philippot, pas le plus populaire des cadres frontistes, s'épargnerait un nouveau vote négatif au prochain congrès, en mars.

Quitter dès à présent le navire, c’est faire le pari de laisser le FN face une refondation qu’il ne souhaite plus assumer, tout en bénéficiant du bruit médiatique provoqué par son départ. On l’imagine dès lors se rapprocher du souverainiste Nicolas Dupont-Aignan.

Champion. Un départ ou une exclusion de Philippot donnerait en tout cas du FN l'image d'un terrible retour en arrière, celle d'un parti replié sur lui-même, hostile au débat et coupeur de tête. Sur le fond, sa démission ou sa mise à l'écart clarifierait la ligne du FN, plus identitaire que souverainiste, confortant une frange droitière majoritaire au sein du parti et orpheline depuis le retrait politique de Marion Maréchal-Le Pen. Le secrétaire général du parti, l'ex-mégrétiste Nicolas Bay, est devenu leur meilleur champion, loin de la veine «gauchiste» d'un Philippot. Manière d'acter que lors de l'entre-deux tours de la présidentielle, Marine Le Pen aurait dû s'adresser aux électeurs de Fillon plutôt qu'à ceux de Mélenchon.