Jérôme Fourquet est directeur du département opinion de l'Ifop. Il vient de publier l'Archipel français, naissance d'une nation multiplie et divisée (Seuil).
Quelle forme pourrait prendre un potentiel rapprochement entre le parti Les Républicains et le Rassemblement national ?
Plusieurs scénarios peuvent exister. Le premier, c’est le programme commun, un accord en bonne et due forme. Mais au sein de l’état-major de LR, cette idée suscite de très fortes oppositions. Sur les questions régaliennes liées à l’immigration ou l’intégration, il y a un certain nombre de positions ne sont pas si éloignées pourtant mais ils martèlent que sur les questions économiques et l’Europe, leurs positions sont inconciliables. Le second, c’est la poursuite de la fragmentation de LR avec la naissance d’un courant sur le flanc droitier qui prendrait son autonomie et serait disponible pour ce rapprochement. C’est le scénario de Marion Maréchal et de la droite patriote mais il n’y a pas les troupes nécessaires pour le mettre en place pour l’instant. Même si la situation évolue de jour en jour, on ne voit pas qui serait prêt à aller dans cette direction. Enfin, la troisième option, c’est un rapprochement sur le terrain de la part d’élus locaux dans la perspective des municipales…
Qui est le scénario le plus plausible selon vous ?
En effet, car il n’y a pas les mêmes verrous qu’au niveau national. Sous couvert d’intérêts locaux, certains maires pourraient s’allier avec des candidats du RN. On peut imaginer des situations à la biterroise avec quelqu’un de proche du parti de Marine Le Pen qui fédère toutes les droites locales comme Robert Ménard l’a fait en 2014. D’autant que, vu son état post-européennes, LR n’a plus le poids politique nécessaire pour s’opposer aux dérives locales. Dans un contexte de droite affaiblie, chacun peut essayer de sauver sa peau en allant soir vers LREM, soit vers le RN, en fonction de sa sensibilité et de la sociologie locale.
Ces municipales vont donc être déterminantes pour le RN ?
C’est toujours plus facile de faire des alliances au niveau local. Il n’y a pas la question des verrous sur les sujets économique et européen et les étiquettes ont moins d’importance. Dans le contexte actuel, elles sont même décotées. De plus, on est entrés dans une phase intense de recomposition du paysage politique. Après les européennes, les municipales marquent une étape supplémentaire. Elles vont permettre de savoir si l’implosion du vote LR, vers LREM ou le RN, s’inscrit dans la durée.