Lundi à Perpignan, Louis Aliot et Eric Zemmour se sont donnés du «mon ami Eric» et «mon ami Louis». Le député RN des Pyrénées-Orientales, candidat (sans étiquette) aux municipales 2020 dans la ville, avait invité le «polémiste» chroniqueur (d'extrême droite) à venir faire la promo de son dernier bouquin, Un destin français, sorti pourtant il y a un an. Les choses avaient été faites en grand, rapporte l'Opinion, qui était sur place : 800 personnes à 5 euros le billet avaient fait le déplacement, pour ovationner le «Mick Jagger de la réacosphère», dixit un ex-FN. Au Palais des congrès de Perpignan, l'auteur a pu développer sa verve xénophobe à base de «grand remplacement» et «filles voilées» débarquant dans nos villages, de «vous verrez bien» et de «moi je sais», le tout face à un Louis Aliot conquis.
L'événement avait tout du meeting de campagne : il a coûté 5 000 euros au candidat aux municipales, en partie pour des flyers «Louis Aliot reçoit Eric Zemmour» distribués un peu partout dans les rues de la ville. Aliot ayant à cœur de se payer la «star» de la «liberté d'expression», définitivement condamné il y a quelques jours à 3 000 euros d'amende pour incitation à la haine raciale : il avait affirmé qu'il fallait donner aux musulmans «le choix entre l'islam et la France». Pour Zemmour, notre pays vivrait «depuis trente ans une invasion», la preuve avec – encore une fois – «ces nombreuses jeunes filles voilées dans les banlieues». Se jouerait là une «lutte pour islamiser un territoire».
Pas d’accréditation pour «Libération», ni «l'Opinion», ni «l'Express»
Outre sa chronique dans le Figaro et sa participation à Zemmour & Naulleau (Paris Première), Zemmour devrait selon le Parisien obtenir un créneau quotidien sur la chaîne CNews. Et samedi prochain, le «polémiste» condamné sera l'invité d'honneur de la Convention de la droite organisée par et pour Marion Maréchal-Le Pen. Une journée de conférences où seront par exemple présents Paul-Marie Coûteaux, ancien conseiller de Marine Le Pen, ou encore Ivan Rioufol, chroniqueur (également) au Figaro, adepte (également) de la théorie du «grand remplacement». Le philosophe Raphaël Enthoven et le député LREM Aurélien Taché seront aussi de la partie, pour apporter la contradiction en tant qu'adversaires politiques.
A noter que plusieurs médias nationaux ont obtenu leur accréditation pour l'événement, mais pas Libération, qui a eu le malheur d'avoir «maltraité l'un des organisateurs», comme nous l'a fait savoir un des organisateurs. Même sort pour l'Opinion ou l'Express, rejetés, eux, parce que les journalistes chargées dans ces deux rédactions du suivi du RN, mais aussi de l'actualité d'Eric Zemmour et de celle de Marion Maréchal-Le Pen, auraient toutes deux, «cherché à leur nuire» et seraient «rusées comme des serpents», leur a fait savoir l'organisation. Comme quoi, à l'extrême droite, la «liberté d'expression» d'un Zemmour condamné vaut plus que la liberté de travailler d'un journaliste. Lundi, à Perpignan, une spectatrice a dit au sujet d'Eric Zemmour : «Il nous ouvre les yeux sur tout ce que les "merdias" ne disent pas.» Tout un programme.