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Municipales

A Perpignan, Louis Aliot en quête d’alliés

Arrivé en tête au premier tour en 2014, le Toulousain se présente sans étiquette, et multiplie les appels vers la droite, indispensable pour être élu en 2020.
Louis Aliot en campagne pour les législatives à Canet-en-Roussillon (Pyrénées-Orientales), en juin 2017. (Photo Georges Bartoli. Divergence)
publié le 16 juin 2019 à 20h56

Rassembler les bonnes volontés qui, c'est bien connu, n'ont pas de couleur politique. A Perpignan, l'un des principaux objectifs du Rassemblement national pour mars 2020, Louis Aliot a lancé sa campagne municipale en parlant le moins possible du parti de Marine Le Pen et en misant sur une union des droites locales de gré à gré. Dès le résultat des européennes connu, celui qui est conseiller municipal dans la capitale des Pyrénées-Orientales depuis 2014 lance dans le quotidien régional l'Indépendant un appel «au bon sens pour éviter que le département retombe à gauche. Il y a des alliances à nouer et c'est maintenant qu'il faut les bâtir». Surfant sur l'effondrement de Les Républicains, le député RN poursuit : «Je suis prêt à faire un compromis avec la droite qui a occupé tous les postes de pouvoir dans ce département et qui est tombée à un score désastreusement bas.» Depuis, sur le terrain, le compagnon de Marine Le Pen vend son projet de «contrat de gestion à l'échelle de la communauté urbaine» composé d'«élus locaux de bonne volonté et en mettant nos étiquettes politiques de côté».

«Concombre masqué»

Mais, même en faisant campagne sans étiquette et avec un slogan local, Louis Aliot sait qu'à Perpignan il a peu de chances de rallier des élus municipaux déjà en place. D'où l'idée de cette alliance à l'échelle de la communauté d'agglomération, pour accentuer la pression de l'extérieur sur la mairie. Pour contrer l'offensive Aliot - arrivé en tête du premier tour en 2014 avec 34,2 % des suffrages -, le maire LR sortant, Jean-Marc Pujol, multiplie les appels du pied aux macronistes, dans l'espoir de rassembler droite, centre et LREM, et de sauver sa tête. Mais face au RN, l'édile avance fragilisé : l'un de ses adjoints, Olivier Amiel, a lancé sa propre candidature et le conseil municipal se déchire. Membre du bureau départemental de LR, Olivier Amiel a cependant formellement décliné l'offre de rapprochement de Louis Aliot. «Cette tentative d'opération de séduction, de la part d'un élu que j'avais déjà comparé au personnage de bande dessinée du Concombre masqué tant il cachait son appartenance à l'extrême droite, doit être prise pour ce qu'elle est : une volonté de débauchage, effectuée par un apparatchik du FN depuis ses débuts en politique, qui se drape en rassembleur», attaque Olivier Amiel dans un communiqué diffusé fin mai.

Au-delà des questions de sensibilités politiques, le précédent de 2014 semble agir pour certains comme un repoussoir. A l'époque, Louis Aliot était déjà à l'affût de ralliements, mais les débauchages «ont fini en psychodrames», raconte un socialiste local. Et depuis, «les élus ont vu ce qu'était l'opposition du FN [devenu RN, ndlr] : zéro travail, zéro connaissance des dossiers, abonde un ancien cadre frontiste ayant décidé de prendre ses distances. Pour rejoindre le RN, il faut être très carriériste ou inculte sur les racines du parti. Quand j'y suis allé, je croyais que les médias le diabolisaient, mais il faut le vivre de l'intérieur : toutes les limites sont franchies. Cela reste un parti d'extrême droite et si vous essayez de soulever des problématiques en interne, vous êtes placardisés.» Selon lui, mis à part quelques jeunes trop naïfs, aucun élu local d'envergure ne rejoindra Aliot.

«Potiches»

Pour l'instant en tout cas, personne n'est sorti du bois. «Est-ce qu'Aliot garde ses soutiens en stock ? s'interroge un bon connaisseur de la ville. Il essaie de faire des débauchages individuels. Certains céderont pour sauver leur tête. Perpignan en 2020, c'est un peu la même situation que Béziers en 2014 : la droite républicaine est en fin de course.» Chez les cadres frontistes de Perpignan, Béziers, à 100 km au nord, géré depuis 2014 par Robert Ménard, est érigé en modèle.

Mais si tout le monde s'accorde pour penser que Louis Aliot pourrait cette fois l'emporter, rien n'est joué. En avril, un sondage Ifop pour l'Indépendant plaçait le Toulousain en tête des intentions de vote mais entre 27 % et 29 % selon les scénarios (liste LR menée par Pujol et liste LREM séparées, liste LR conduite par Olivier Amiel, liste commune LR-LREM). Soit un recul de 5 à 7 points par rapport au score qu'Aliot a réalisé au premier tour il y a cinq ans. Mais «avec sa notoriété, sans l'étiquette FN, deux, trois potiches à mettre en avant pour se donner une crédibilité, le bilan de la droite locale et un candidat de la majorité présidentielle qui n'est pas bien implanté, la victoire est très envisageable», prédit l'ancien cadre frontiste. C'est à ce moment-là que son «contrat de gestion» pourrait servir. Soit une alliance avec d'autres municipalités, des «maires de village» des alentours. L'union par la force des choses ?