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Municipales : le RN veut grignoter pour mieux régner

Sans vouloir paraître trop ambitieux pour le scrutin de 2020, le parti d’extrême droite espère gagner au moins autant de villes qu’en 2014, soit une douzaine. La formation, qui anticipe les tractations pour l’empêcher de remporter des communes, prévoit de faire campagne par «rayonnement» là où elle est déjà implantée.
Marine Le Pen et Steeve Briois (au centre) à Hénin-Beaumont (Pas de Calais), le 10 septembre 2017. (Laurent Troude/Photo Laurent Troude)
publié le 22 août 2019 à 21h06

«Avant toute chose, faire mieux que la dernière fois.» Si l'objectif affiché par le Rassemblement national (RN) pour les municipales de 2020 n'apparaît de prime abord pas si ambitieux pour qui se revendique «premier parti de France», il aura au moins le mérite de lui éviter de grandes déceptions à la fin.

Spectre

Finaliste de la dernière présidentielle, la formation d'extrême droite, en campagne depuis mi-juin, se refuse à tout objectif chiffré pour 2020, consciente des difficultés qu'elle a d'ordinaire à briller dans les scrutins locaux. En 2014, le RN avait raflé une douzaine de villes, un record, mais certaines l'avaient été par surprise, souvent dans le cadre de triangulaires ou de quadrangulaires… Ce fut le cas à Mantes-la-Ville (Yvelines) ou à Hayange (Moselle). «Plus que jamais, on va avoir ce soi-disant "front républicain" partout contre nous, prédit un cadre. On va être seuls opposés à tous et à la fin, ce qui va jouer, c'est si en face les fusions et petits arrangements se feront ou pas…»

Anticipant les tractations de second tour au désavantage de son parti, Marine Le Pen a lancé cet été à La Rochelle «un appel solennel à tous ceux qui se sentent embrigadés et prêts à constituer des alliances». Elle veut «capitaliser sur le délitement de LR, qui n'existe plus», explique un proche,et jouer plus ou moins avec les mêmes cartes que LREM, qui va multiplier les tentatives d'absorption pour sa première expérience d'implantation au niveau local. Même si, au RN, on parie que «le raz de marée annoncé par LREM n'arrivera pas. Car dans beaucoup de communes, les maires sortants, PS ou de droite, qui ont fait un bon boulot, peu importe leur étiquette, vont être difficiles à déloger».

Tremplin

Pour les européennes, qu'elle a remportées (avec 23,3 % des votes), le RN avait joué la carte de l'opposition frontale à Macron. Faisant du scrutin un match retour de la finale de la présidentielle. Cette fois, le mot d'ordre sera plutôt «si vous voulez que les choses changent en France, commencez par changer au niveau de la commune». Dans cette optique, le parti va donc aussi tâcher de «capitaliser sur le bilan des villes gagnées en 2014» pour élargir son spectre autour. Au RN on appelle cela le «rayonnement». Localement, ses adversaires parlent de «stratégie de l'inondation» : cela consiste par exemple à présenter des listes dans toutes les villes de l'agglomération de Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), sa commune vitrine : à Noyelles-Godault, à dix minutes en voiture, le parti d'extrême droite va investir la mère de Steeve Briois (maire de Hénin-Beaumont). La commune est considérée comme gagnable parce que le RN y a fait 50,65 % aux européennes. Et au pire des cas, il se contentera «d'avoir la meilleure opposition possible. Car les victoires d'après-demain sont les oppositions de demain», a dit Marine Le Pen.

Les municipales 2020 sont considérées en interne comme un tremplin pour les départementales, puis les régionales. Le RN aura donc besoin d'un maillage local fort… Pour cela, il va chercher à être présent partout, si «la qualité est au rendez-vous». Manière de dire que cette fois le parti va éviter l'écueil de 2014, où il avait parfois investi… n'importe qui.