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Ile-de-France, îlots d'amour (fin) Sur les traces des amants maudits. Mais où sont Héloïse et Abélard? Une tombe au Père-Lachaise, une avenue à Argenteuil...

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publié le 16 août 1996 à 9h31

«S'il vous plaît, le monastère d'Héloïse, c'est où?» Chaque été, des

touristes un peu perdus errent boulevard Héloïse, à Argenteuil. Souvent des Anglais, le peuple le plus sensible aux histoires d'amour tragiques. Pour découvrir avec horreur qu'il ne reste pratiquement aucune pierre à laquelle raccrocher leurs émotions. Les rois du béton sont passés par là, couronnant l'entrée d'Argenteuil d'une énorme fresque d'Edouard Pignon.

Flash-back. Les religieuses d'Argenteuil accueillent vers 1110 celle que le puissant Fulbert, chanoine de Notre-Dame-de-Paris, présente comme sa nièce, mais qui est certainement sa fille naturelle. Elle s'appelle Héloïse. Elle est, disent des contemporains, «la plus belle, la plus gracieuse et la plus érudite des femmes de son temps». Alors que la plupart des jeunes filles ne reçoivent pas d'instruction, Fulbert veut donner à sa «nièce» une formation exceptionnelle. Elle lit le latin, le grec et l'hébreu. C'est ainsi qu'elle attire l'attention d'un célèbre philosophe de l'époque, Abélard. Celui-ci s'était rendu illustre par ses controverses avec son maître Guillaume. Assez infatué de lui-même ­ il se disait «le seul philosophe du monde» ­, il est réputé troubler les femmes «par l'éclat de sa beauté, la séduction de sa parole et la douceur de sa voix». Ce théologien scolastique est aussi un libertin avant la lettre. Parvenu au faîte de la gloire, le professeur multiplie les frasques amoureuses. C'est en 1113 ou 1114 qu'Abélard entreprend de séduire Hé