C’est un champion compte triple. Nigel Richards, déjà maître inégalé du Scrabble anglo et francophone, a ajouté lundi 11 novembre une nouvelle corde à son arc lettré, en devenant champion du monde de Scrabble Duplicate hispanophone à Grenade, en Andalousie. Le tout sans parler un mot d’espagnol, pas plus d’ailleurs qu’il ne parle un mot de français. Pour déjouer l’ennui de jouer dans sa langue maternelle – trop facile –, le surdoué compétiteur a tout simplement mémorisé le dictionnaire, ou en tout cas l’ensemble des mots admis au Scrabble. Soit, pour la version espagnole, qui compte également des doubles lettres, «environ quatre fois plus de mots valides» que la francophone, a expliqué sur X Jean-Baptiste Morel.
Portrait
Rédacteur en chef d’Actu.fr et afficionado de Scrabble depuis une trentaine d’années, ce dernier s’est amusé à live-tweeter le championnat du monde diffusé sur Twitch et où malgré sa notoriété, le Néo-Zélandais de 57 ans était loin de faire figure de favori. Il lui aura fallu une sacrée remontada pour dépasser le polyglotte lillois Serge Emig, au palmarès impressionnant sur la scène hispanophone et qui caracolait en tête jusqu’à la dernière partie. Plus impressionnant encore, Nigel Richards aura plusieurs fois égalé l’ordinateur, capable de trouver à chaque fois la meilleure combinaison de lettres possible.
«On n’avait pas réalisé que c’était un ordinateur»
En 2015, en débarquant sur les compétitions francophones avec son hypermnésie et ses manières bourrues, Nigel Richards avait étonné et fasciné le petit monde du Scrabble. «On savait que c’était un monstre, soufflait à l’époque à Libération l’ancien champion du monde Benjamin Valour. On n’avait pas réalisé que c’était un ordinateur.» Le journaliste de Libé envoyé spécialement à Louvain-La-Neuve, en Belgique, pour rencontrer l’animal, avait tenté en vain de lui soutirer plus de trois mots. Las, le génie a toujours refusé de parler à la presse, et ne faisait «aucune exception».
En remportant ce tournoi de Scrabble Duplicate – une forme de jeu individuel où tous les joueurs reçoivent la même pioche de lettres et doivent chacun trouver le meilleur mot possible, celui qui leur rapportera le plus de points – Nigel Richards compte désormais à son palmarès «quatre titres de champion du monde de Scrabble anglophones, dix titres francophones, et un titre hispanophone», raconte encore Jean-Baptiste Morel. Reste à transformer l’essai lors de l’épreuve de Scrabble classique, mais plus grand monde ne doute qu’il en est capable.