Jay-Z, le rappeur et homme d’affaires milliardaire de 54 ans, est-il en passe d’être officiellement commémoré de son vivant ? Même Martin Luther King, symbole de la lutte pour les droits civiques, avait dû attendre dix-huit ans après sa mort en 1968 pour être honoré, à partir de 1986, avec un «Martin Luther King Day» célébré chaque année autour 15 janvier dans l’ensemble du pays. L’idée peut sembler folle, mais le conseil municipal de la ville de New York a proposé un projet de loi pour fêter chaque 4 décembre le «Jay-Z Day». Le texte, qui sera voté le 3 janvier, prévoit de reconnaître l’anniversaire de Jay-Z (natif de Brooklyn) comme un jour officiel et… férié dans la ville.
L’audacieuse résolution est portée par la conseillère municipale Farah Louis, 40 ans. «Le phénomène mondial qu’est Jay-Z, né Shawn Carter, est largement reconnu comme artiste, magnat, mari et père, bâtisseur de richesse et partisan du développement économique et des causes communautaires», s’est-elle enthousiasmée dans son discours au conseil de New York. Lorsque Jay-Z sortait Reasonable Doubt, son premier album sorti en 1996 et certifié platine, l’élue avait 13 ans. La membre du Parti démocrate, elle aussi née à Brooklyn, de parents haïtiens, poursuit : «Faire du 4 décembre, le Jay-Z Day prouve au monde entier comment ce gamin de Brooklyn peut être un exemple de réussite, tout en étant aimé par sa communauté. Dans le cadre de la célébration du 50e anniversaire du hip-hop, il serait pertinent de mettre à l’honneur chaque année notre héros local en lui apportant notre soutien municipal.» Le vote sur son projet doit avoir lieu mercredi 3 janvier.
NYC councilwoman seeks to declare each December 4 "Jay-Z Day" pic.twitter.com/HrkDTWRhdw
— JAY-Z Daily (@JAY_Z_Daily) December 23, 2023
Au cœur de l’été, le monde fêtait les 50 ans du hip-hop, un courant né dans les ghettos new-yorkais et devenu majeur. Grâce au DJ jamaïcano-américain Kool Herc qui lance en août 1973 un mouvement planétaire en bouclant des breaks de soul et de funk sur ses platines lors d’une block party (une fête de quartier dans la rue) dans le Bronx. Pour la ville qui ne dort jamais, c’était l’occasion de marquer le coup. Ainsi en juillet, en plus d’un grand concert au Yankee Stadium (enceinte de baseball du Bronx pouvant accueillir 46 000 spectateurs), les textes du rappeur Jay-Z s’affichaient sur les façades art déco de la grande bibliothèque de Brooklyn. A l’intérieur de cette dernière, une exposition intitulée Book Of HOV – toujours en cours et gratuite – retrace la carrière monumentale de celui qui a construit sa légende en inscrivant sa trajectoire sulfureuse dans les codes du mythe éculé du rêve américain.
Shawn Corey Carter et ses trois frères et sœurs, élevés par leur mère Gloria Carter, grandissent dans le coupe-gorge de la cité HLM appelée Marcy Projects. Le daron Adnis Reeves a déserté le domicile familial. Le jeune Shawn va se mettre à dealer du crack (drogue qui crée des ravages dans les communautés afro-américaines) avant de devenir l’un des plus grands rappeurs à partir des années 2000, puis un businessman milliardaire à la tête d’un empire du divertissement, Roc Nation, qui a monté dans le plus grand secret l’expo Book Of HOV.
The Book of HOV, an immersive tribute to legendary rapper Jay Z, set a record attendance and engagement during a five-month stint at @BKLYNlibrary. https://t.co/5EHldTrGm9
— Brooklyn Paper (@brooklynpaper) December 28, 2023
La carrière musicale de Jay-Z est dantesque : il a placé 14 de ses albums en tête du Billboard 200. Un record devancé uniquement par les Beatles, qui en ont placé 19 en tête du classement musical de référence aux Etats-Unis. Shawn Carter, qui forme l’un des couples les plus puissants et adulés avec son épouse Beyoncé Knowles, a multiplié tout au long de sa carrière les hits planétaires comme «Hard Knock Life (Ghetto Anthem)», «Izzo (H.O.V.A.)». Son tube, ode à la ville de New York, Empire State of Mind (avec Alicia Keys au refrain) a dépassé les frontières du rap. Il ne serait pas surprenant que ce titre retentisse dans la ville, chaque 4 décembre, si le minot de Brooklyn était amené à être officiellement célébré.