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Dictionnaire

«Cluster», «coronapiste», «télétravail»... Le «Petit Larousse» à son tour covidé

La pandémie de Covid-19 en Francedossier
Dans son millésime 2022, à paraître en juin, le dictionnaire accueille 170 nouveaux mots, dont de nombreux sont apparus ou ont été ressuscités par la crise sanitaire.
(Marc Chesneau/Getty Images/iStockphoto)
publié le 5 mai 2021 à 6h01

Chaque année, ils sont annoncés en grande pompe, égrenés comme les noms de jeunes convives au bal des débutantes. Ce mardi, les voici donc : les nouveaux venus du Petit Larousse – la version actualisée du célèbre dictionnaire de 2 000 pages environ à paraître en juin. Ils sont cette année au nombre de 170, révèle le Figaro, à qui les lexicographes du comité de sélection de Larousse ont réservé la primeur de l’information.

Nombre record de mots

Ceux-ci n’ont pas été en mal d’inspiration tant la pandémie a chahuté le langage depuis un peu plus d’un an. Au contraire, notent les spécialistes auprès du quotidien conservateur : un nombre record de mots entrent dans le millésime 2022. Et ils sont pour la plupart issus du vocabulaire de la crise sanitaire. Le premier d’entre eux est incontestablement le terme «Covid-19». Mais les dictionnaristes n’ont pas tranché son genre, notant toutefois son emploi courant au masculin, à rebours des préconisations de l’Académie française qui préfère un usage au féminin.

L’acronyme anglais du virus responsable de la /le Covid, le bien masculin «SARS-CoV-2» fait également son entrée comme toute une série de vocables médicaux à l’instar de «nasopharyngé», adjectif relatif au «prélèvement de cellules ou de micro-organismes à l’aide d’un écouvillon introduit dans le nez jusqu’à la partie supérieure du pharynx, afin d’effectuer un test diagnostique», ou «cluster», anglicisme signifiant «foyer de contagion». Certains de ces mots ne sont pas nouveaux : c’est le cas d’«asymptomatique», adjectif qui dans le dictionnaire plus que centenaire devient aussi nom commun, ou d’«écouvillon», vieux terme médiéval ressuscité.

Vocabulaire des vies covidées

Aussi, nos vies covidées ont fourni quelques jolies créations lexicales aujourd’hui consacrées, comme elles l’avaient été dans le Petit Robert l’an passé : c’est le cas de «coronapiste», ces pistes cyclables provisoires nées du déconfinement pour favoriser la pratique du vélo en ville, ou «click and collect», l’anglicisme de «cliquer-retirer», pour les services de retrait d’achats commandés en ligne. Tandis qu’à la croisée des bouleversements pandémiques et numériques, le «télétravail», aussi décliné en verbe, s’impose lui aussi dans le Petit Larousse. Ce qui n’est pas le cas des «apérozoom» ou des «skypeapéro», déjà jugés désuets.

«Dans toute période de crise, la langue bouge. On l’a vu durant la Révolution française ou la Seconde Guerre mondiale, par exemple. Mais depuis mars 2020, c’est encore plus spectaculaire», résume au Figaro le linguiste Bernard Cerquiglini. Néanmoins, la société se transforme aussi sous l’emprise toujours plus grande de la tech. Pas étonnant donc que les mots de l’ultra-connexion continuent d’affluer dans le dico. Comme «VPN», «réseau privé virtuel» très utile pour le télétravail ou «émoji», ce langage graphique ultra-connoté des communications électroniques et des réseaux sociaux. Enfin, les festifs «mocktail» (pour cocktail sans alcool) et «s’enjailler» (du nouchi, l’argot ivoirien, pour «faire la fête, s’amuser») ont également été retenus. Pour anticiper des années folles post-Covid ?