Le boom du cyclotourisme est porté par une clientèle qui préfère recourir aux services de loueurs ou d’agences de voyages plutôt que de gérer soi-même bicyclettes et logistique. A tel point que certains professionnels ont du mal à suivre. Le tour-opérateur Terres d’Aventure, pour qui le vélo reste un mode de déplacement de niche (10 % à 20 % des réservations seulement), a ainsi enregistré une hausse de plus de 20 % des demandes pour ce type de formules depuis l’année dernière. D’autres voyagistes spécialisés dans le tourisme à deux-roues ont même réussi à passer la période Covid sans pertes. «En 2020, nous avons fait une année très concentrée sur l’été, avec 770 clients, presque autant que l’année précédente, en conservant un chiffre d’affaires stable de 750 000 euros», détaille David Renvoisé, fondateur de Abicylette. Les agences européennes, qui lui apportaient jusqu’ici un tiers de sa clientèle, ont fermé les vannes : sa société s’est recentrée sur la vente directe de services aux particuliers. Avec succès. «Cette année, nous avons déjà franchi la barre des 1 300 réservations et nous prévoyons de dépasser le 1,2 million d’euros de chiffre d’affaires», comptabilise le chef d’entreprise.
Edito
Des vélos au compte-gouttes
Le calme plat du confinement a été l’occasion de réfléchir à adapter son catalogue à une nouvelle clientèle plus française, plus citadine et moins expérimentée. «Depuis quelques années, la pratique s’est démocratisée, s’étendant aux familles, aux couples de plus en plus jeunes et aux groupes d’amis», détaille le voyagiste. «La Vélodyssée, le long de la côte Atlantique, est par exemple très balisée et donc particulièrement adaptée à ces nouveaux cyclistes amateurs», pointe Sébastien Almazan, qui gère l’agence de location BicyBags. Il propose aujourd’hui davantage de vélos à assistance électrique, très appréciés par les débutants, ou dotés d’attaches pour tracter un vélo enfant.
Reste une difficulté, de taille, pour les loueurs : trouver des vélos pour renforcer leur parc. A l’heure actuelle, le principal fournisseur mondial de pièces périphériques (freins, dérailleurs, pédales…), le japonais Shimano, ne parvient pas à tenir le rythme face à la demande. Résultat : les vélos sortent des usines au compte-gouttes. «Cette pénurie nous handicape complètement, déplore le loueur. Certaines commandes validées il y a un an n’ont toujours pas été honorées.» Un constat partagé par l’ensemble des professionnels interrogés, qui regrettent des délais d’attente drastiquement rallongés, alors que les fournisseurs de vélos Trek et Cannondale estiment qu’ils devraient rester en rupture de stock jusqu’en 2022.
Mission impossible
Les agences de voyages qui proposent des formules avec prise en charge de la logistique et de l’hébergement sont confrontées à un autre obstacle : la difficulté de trouver des chambres louables pour une seule nuit. «Certains hébergements labélisés “Accueil Vélo” refusent les réservations à la nuitée, pour une clientèle qu’ils perçoivent comme contraignante, regrette Bérangère Florin, cofondatrice de l’agence Vélo Voyageur. C’est pourtant interdit par la charte qu’ils ont signée.» Sur certains trajets populaires comme celui de la côte Atlantique, réserver une chambre durant les mois d’été relève de la mission impossible. D’autres voyagistes regrettent que certains hébergements ferment leurs réceptions dans l’après-midi ou le soir, compliquant d’autant la livraison des bagages des cyclistes.
Certaines régions sont tout simplement dépourvues de tels services. «Malgré les infrastructures adaptées aux vélos, certains circuits dans l’est de la France comme la ViaRhôna ou l’EuroVelo 6, ne sont pas couverts par des sociétés de transports de valises car les cyclistes germanophones ou anglais sur ces tracés amènent en général leur propre matériel», explique Bérangère Florin. Une offre qui pourrait évoluer si le nombre d’adeptes du cyclotourisme continue de grimper.
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