Un intérieur de 800m2 de surface au sol, auquel il faut ajouter 1000m2 de terrasses, dont un belvédère avec vue panoramique sur Paris, un parc de cinq hectares, une piscine et une maison de gardien de 93m2. Le tout pour un petit 4 millions d’euros, sans compter les «travaux à prévoir». L’annonce, tout juste publiée par l’agence Architecture de collection, et qui court au moins depuis août chez d’autres, a de quoi faire tourner les têtes et chavirer les cœurs des aventuriers des affaires immobilières. Les passionnés d’architecture, non plus, ne seront pas en reste.
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Et pour cause : il ne s’agit pas de n’importe quelle villa à vendre, mais bien de la villa Poiret, à Mézy-sur-Seine (Yvelines). Bâtie il y a un siècle à 40 km de Paris, cette demeure, exemple du mouvement moderniste alors émergent, est l’œuvre de l’architecte Robert Mallet-Stevens – à qui l’on doit aussi la villa Cavrois, près de Roubaix, ou la villa Noailles à Hyères (Var). Elle est inscrite au titre des monuments historiques depuis 1984, mais a surtout connu depuis sa fondation dix vies.
Style paquebot
D’abord commandé par le couturier Paul Poiret à l’architecte décorateur, ce palais géométrique, monolithe blanc en béton armé, reste d’abord inachevé après la faillite du styliste au mi-temps des années 20. La villa cubiste, aux larges baies vitrées, est ensuite acquise en 1930 par l’actrice roumaine Elvire Popesco, mais c’est un autre architecte, Paul Boyer, qui en termine le chantier à la fin de la décennie. Elle y vit jusqu’en 1985 et y fait aménager des hublots, caractéristique du style paquebot de l’entre-deux-guerres.
Série d'été
Laissée à l’abandon, la ville est rachetée en 1989 par le fantasque homme d’affaires Sidney Nata qui y organise deux ans plus tard la «confrontation de Mézy», projet mégalo qui réunit 17 figures de l’architecture internationale (Norman Foster, Ricardo Bofill, Jean Nouvel, Renzo Piano, etc) pour la réalisation d’un lotissement de 17 maisons manifestes. Rien de tout cela ne voit le jour et la villa Poiret est mise aux enchères à la mort du self-made-man endetté. S’y succèdent au gré des ventes et des plus-values : un industriel en 1999 ; le marchand d’art et promoteur Laurent Brun en 2006, qui fait moderniser les sous-sols par Jean-Michel Wilmotte ; puis, en 2016, un nouveau promoteur, Jean-Pierre Jarjaille, en fait l’acquisition pour 2,2 millions d’euros. La saga immobilière, patrimoniale et architecturale n’en finit pas.