Trois sites bretons font partie des dix chefs-d’œuvre d’architecture français listés le 6 avril par le magazine spécialisé AD (Architectural Digest). Il s’agit du jardin du château de la Ballue à Bazouges-la-Pérouse (Ille-et-Vilaine), des tours d’immeuble de l’architecte Georges Maillols à Rennes (Ille-et-Vilaine) et du village vacances de Beg-Meil (Finistère).
Beg-Meil, l’«architecture-sculpture»
A Beg-Meil, dans le sud du Finistère, on trouve un club de vacances à l’architecture (pour ne pas dire sculpture) futuriste. Ensemble de bulles et de dômes en béton blanc, la construction a des airs du village d’Anakin Skywalker dans Star Wars, ou alors de ce à quoi pourrait ressembler une maison sur Mars. Ce village vacances, l’un des tout premiers en France, a été imaginé et construit en 1968 par l’architecte Henri Mouette et le sculpteur Pierre Székely au milieu d’un parc de dix hectares. En 2007, il a été labellisé «patrimoine du XXe siècle».
Le site, tout en rondeurs, voulu par l’association Renouveau qui avait à cœur de promouvoir les vacances familiales au cours des années 60, «est, à l’abri des dunes et des pins, une architecture-sculpture singulière qui se compose d’une succession d’unités d’habitation cylindriques groupées et rangées de manière décalées, auxquelles il faut ajouter des équipements collectifs aux formes courbes et à l’aspect ludique abritant la réception et les restaurants», indique la Cité de l’Architecture et du Patrimoine. Rénové en 2018 et pouvant accueillir jusqu’à plus de 500 lits, «ce lieu s’inscrit dans un moment où la conception de villages communautaires dédiés au tourisme social a connu un essor important avec le développement du tourisme de masse dans les années 60».
La Ballue, des airs d’«Alice aux pays des merveilles»
Le jardin de la Ballue est un véritable labyrinthe avec des buis aux formes géométriques et des chemins tracés en diagonales. C’est en 1977 que le château éponyme a été classé monument historique avant que ce label ne soit étendu, en 1999, au jardin qu’il surplombe. Ce coin de verdure fait également partie des «jardins remarquables» de France (une distinction décernée par le ministère de la Culture et renouvelée tous les cinq ans).
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Marie-Françoise Mathiot-Mathon, médecin, et son mari sont propriétaires de l’endroit depuis 2005. «Pendant de nombreuses années, le château a été notre résidence principale. Aujourd’hui, il est devenu une maison d’hôtes et le jardin, un lieu de visite touristique, indique-t-elle en ajoutant être passionnée de patrimoine. Le bâti date du XVIIe siècle et le jardin a été recréé par deux architectes à la signature utopiste-futuriste, à l’invitation de l’éditrice Claude Arthaud – dont la famille a aussi été propriétaire du lieu – dans les années 70.»
Résultat : un parc de deux hectares né il y a quarante-cinq ans, très dense en termes de végétation, au caractère onirique, graphique, ludique. «Il a quelque chose de fantastique. Quand on y pénètre, on se croirait dans Alice aux Pays des Merveilles. Il a une âme et une certaine profondeur. C’est un lieu extraordinaire, situé au niveau des anciennes frontières du duché de Bretagne et d’où l’on peut admirer la Vallée du Semnon qui borde, au bout de ses 30 kilomètres, le Mont Saint-Michel.» Quatre jardiniers s’occupent quotidiennement du jardin qui a reçu le second prix du European Garden Heritage Network des jardins 2018 dans la catégorie «Restauration, amélioration ou développement d’un parc ou d’un jardin historique». Une merveille végétale dont les allées vertes, au printemps, se couvrent de glycines.
Les Horizons, «témoins de l’urbanisme contemporain»
Les tours de 30 étages dessinées par l’architecte Georges Maillols, nommées les Horizons, ont été édifiées en 1970, à Rennes, à l’ouest du centre historique de la ville. Aussi appelées «les tours siamoises» ou «l’épi de maïs» à cause de leurs formes arrondies, ces bâtiments font partie des premiers immeubles de grande hauteur (IGH) à usage d’habitation construits en France.
«Les deux tours sont situées à deux pas du marché des Lices dans le quartier de Bourg-L’Evesque, très prisé aujourd’hui, informe l’urbaniste Laure Kiriakou, basée à Rennes. Elles sont entourées par un paysage mi-urbain, mi-naturel de par les cours d’eau que l’on retrouve dans le quartier : le canal d’Ille-et-Rance et celui qui court le long de l’allée Alfred-Jarry.» Les deux tours sont orientées d’est en ouest, «la meilleure orientation pour un appartement dans cette région», ajoute Laure Kiriakou en évoquant des levers et couchers de soleil visibles pour les habitants des deux tours. «C’est une véritable œuvre et prouesse architecturale de par sa rondeur et le travail autour de la luminosité. De plus, il n’y a aucun vis-à-vis.» Notons qu’y a vécu, au trentième et dernier étage, l’écrivain Milan Kundera entre 1975 et 1979.
Pour Maillols, les deux tours étaient «les témoins légitimes de l’urbanisme contemporain». L’architecte breton David Cras, également basé à Rennes et ami de feu Georges Maillols, a confié, interrogé par nos confrères de France 3 Bretagne, que ce dernier «a toujours été attentif à ce qui est mécanique et beau à la fois. C’est le propre du design d’objet. Un mélange de pragmatisme et d’esthétique».
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