Faire de la Défense le premier pôle d’affaires bas ou post-carbone : voilà l’ambition du gestionnaire (un établissement public) chargé depuis cinq ans de ce territoire emblématique des Trente glorieuses avec ses tours modernistes de verre et d’acier. Comment ? En divisant par deux les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 de ce quartier, 40 000 habitants et 180 000 salariés au compteur, à l’empreinte carbone équivalente à celle d’une capitale régionale. Plus précisément, en privilégiant pour sa mue des projets immobiliers «exemplaires» ou «durables», soumis à des critères d’écoconditionnalité.
A lire aussi
C’est que le «bas carbone», objectif louable et inscrit dans la loi, est désormais l’alpha et l’oméga de tout projet architectural contemporain censé être à la hauteur du défi climatique. Or il sonne trop souvent comme un mantra vide de toute substance, alors qu’en France, le seul secteur du bâtiment est à l’origine d’un quart des émissions nationales de CO2. Sans compter les quantités astronomiques de déchets annuels générés par le BTP et l’artificialisation des terres. D’où la nécessité, selon nous, de plaider pour une architecture plus ambitieuse d’un point de vue environnemental, telle qu’elle est prônée par les auteurs du manifeste de la «frugalité heureuse et créative» ou telle qu’elle est mise en pratique par de très nombreux professionnels engagés dans cette transition (architectes, ingénieurs, maîtres d’ouvrage, etc.). Soit la revendication d’une archisobriété respectueuse du vivant.
A lire aussi
Cela ne veut pas dire renier confort de vie ou geste esthétique, aussi bien pour une maison individuelle qu’un groupement HLM. Cela passe par le fait de privilégier au polluant béton des matériaux écologiques, issus de filières locales, y compris pour le bâti public comme en témoigne la multiplication d’écoles, salles polyvalentes et autres gymnases en bois. On pense également à la terre crue ou la paille, formidables isolants thermiques et hygrométriques. C’est aussi faire avec le bâti existant, en misant sur la réhabilitation, le réemploi ou les extensions plutôt que sur la construction neuve à n’importe quel prix. C’est s’interroger en amont sur la légitimité d’un projet architectural ou urbanistique d’un point de vue environnemental. C’est, enfin, privilégier des solutions techniques de constructions peu complexes, mais tout aussi redoutables d’un point de vue de la performance énergétique. Une question de bon sens.