Dans le sac à dos de l’exil, il y a très souvent des recettes de cuisine, des plats de l’enfance et des saveurs gravées à jamais dans les papilles des migrants. C’est tout le sens du livre Cuisine sans frontières (1) concocté par l’association du même nom qui favorise la rencontre des cultures autour des fourneaux et l’intégration des personnes migrantes. Quand on nourrit l’autre, on ignore les barrières du monde, on est dans le partage des goûts et des destins. C’est ainsi que Cuisine sans frontières présente une quarantaine de recettes proposées et préparées par les ressortissants d’une trentaine de pays représentés dans l’association : Algérie, Albanie, Géorgie, Congo, RDC, Côte d’Ivoire, Nigeria…

«Les ateliers de cuisine sont le cœur de notre activité, explique Sandrine Trigeassou, coprésidente de l’association. A tour de rôle, chacun revêt la toque de chef(f)e et entraîne la brigade dans la préparation d’un menu traditionnel. Les plats cuisinés sont ensuite vendus sur place, à emporter ou pour des buffets. Nous préparons également des repas distribués lors des maraudes, et organisons des ateliers de cuisine thématiques. Nous avons déjà préparé plus de 400 buffets, et quelque 25 000 boîtes repas pour nos adhérents. Grâce à nos prestations restauration traiteur, nous nous autofinançons à hauteur de 70% et percevons aussi des subventions des collectivités et de mécènes.»

Sandrine Trigeassou rappelle un constat sans appel : «En France, des milliers d’emplois sont non pourvus dans le secteur de la restauration. Former des personnes migrantes répond à ce besoin en main-d’œuvre. Ne pas leur permettre de travailler représente non seulement du temps perdu pour eux mais aussi un énorme manque à gagner pour notre économie. C’est perdant-perdant !» Cuisine sans frontières prépare en un an une petite promotion au CAP production et service en restauration.

Ce dimanche, on vous propose de tenter les rouleaux d’aubergines aux noix de Svetlana, originaire de Géorgie, un pays du Caucase réputé pour sa gastronomie et sa tradition de banquets. Dans l’une des tranches de vie qui jalonne Cuisine sans frontières, elle raconte : «La première fois que j’ai cuisiné, je me souviens, j’avais 14 ans. Mon plat préféré quand j’étais petite, c’était le vareniki [sorte de raviole, ndlr] aux cerises de ma grand-mère !» Svetlana apparaît dans le reportage dessiné par l’illustrateur Morgan Navarro à la fin de l’ouvrage.

Pour 10 rouleaux d’aubergines aux noix, il vous faut 2 aubergines de taille moyenne ; 100 g de poudre de noix ; 1 gousse d’ail ; 1 cuillère à café de khmeli-suneli (mélangez à parts égales de la coriandre moulue et du fenugrec moulu) ; 1 pincée de safran ; de l’huile de tournesol ; du sel et du poivre ; de l’eau tiède ; des graines de grenade pour la décoration.

Enlevez le bout des aubergines et lavez-les. Coupez-les en tranches (d’environ 5 à 7 mm d’épaisseur) dans la longueur. Salez-les, mélangez et laissez-les reposer dix minutes environ. Séchez-les dans un torchon ou du papier absorbant. Dans une poêle huilée, faites frire les tranches des deux côtés, jusqu’à ce qu’elles soient bien dorées. Placez-les sur du papier absorbant. Laissez-les refroidir. Dans un saladier, mélangez la poudre de noix, l’ail pressé, les épices, salez et poivrez. Pressez avec une cuillère en bois puis ajoutez un peu d’eau tiède pour faire gonfler la préparation et obtenir une texture crémeuse. Prenez une tranche d’aubergine et étalez dessus la préparation aux noix (2 à 3 mm d’épaisseur). Roulez ensuite la tranche dans sa longueur. Une fois que le rouleau est fait, ajoutez un peu de préparation aux noix sur le dessus et décorez avec quelques graines de grenade.