L’autre matin, on s’est dit qu’il fallait sauver une botte de bettes (aussi appelées blettes et poirée) du bac à légumes, un brin mortifère quand la flemme de fricasser nous habite trop longtemps. Pourtant, elle a tout pour plaire, la bette, comme le souligne Béatrice Vigot-Lagandré dans son délicieux opuscule consacré à la grande famille des épinards, tétragone, blettes, betteraves et autres cardons (1). De la bette, elle raconte : «Déjà connu et cuisiné dans l’Antiquité, ce légume à feuille s’est beaucoup popularisé au Moyen Age, où il entrait dans la composition de nombreuses recettes. Bizarrement, la consommation des blettes a sensiblement baissé au XXe siècle, à l’exception peut-être du sud de la France, où elles font véritablement partie du patrimoine culinaire : on trouve ainsi nombre de recettes de blettes dans les cuisines niçoises ou corses.»
Photos fanées du tiroir
Mais pas que, car pour nous, la blette appelle toutes sortes de vagabondages culinaires dans les allées du marché et en cuisine. Ainsi, l’autre matin qui sent le parfum des premières feuilles mortes alors que les dernières tomates du jardin tentent encore de se dorer la pilule, on se dit qu’il nous faut une recette qui dise encore un peu l’été indien mais aussi les prémices des jours froids à venir. On convoque alors la saucisse de Morteau, qui nous est aussi indispensable en bectance que l’Education sentimentale de Gustave Flaubert en littérature. Parce que la Morteau, c’est le meilleur instrument pour interpréte