Les confrères de sa génération l’appellent «Alain» avec un mélange de tendresse et de respect. Le landerneau médiatico-gastronomique le nomme «Ducasse» sur un ton aussi laudateur qu’agacé. Tout est dans cette dichotomie autour d’Alain Ducasse, 64 ans, chef de cuisine et homme d’affaires français naturalisé monégasque aussi étoilé qu’un maréchal de l’ex-Union soviétique. Tout juste débarqué de son vaisseau amiral, le Plaza Athénée, le roi des palaces parisiens où il officiait depuis vingt et un ans.
Tout Paris bruissait depuis plusieurs semaines de ce lourdage scellé par un communiqué de presse diffusé le 17 mai au style bien dans son époque, c’est-à-dire mélange de langue de bois de la Pravda de l’ancien temps et de cire pompe faux cul 3.0. «Les trois étoiles du restaurant Alain Ducasse au Plaza Athénée, obtenues autour de la naturalité et de sa cuisine respectueuse des ressources de notre planète, auront marqué l’histoire de la haute gastronomie et celle de ce grand palace parisien», écrit François Delahaye, directeur des opérations de Dorchester Collection, la très chic chaîne de palaces (le Meurice aussi à Paris, le Dorchester à Londres, le Beverly Hills Hotel à Los Angeles…), propriété de l’Agence d’investissement de Brunei, ce riche confetti pétrolier dont le sultan a instauré une charia condamnant à la lapidation les coupables d’adultère et d’homosexualité.
Des mots aussi pesés que la levure dans la brioche
Mais qu’importe, les affaires sont les affaires : une pluie d’étoiles valent bien un tom