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Libération

Les bars fermés, les Français picolent à la maison, mais pas forcément plus

La pandémie de Covid-19 en Francedossier
Plusieurs études font état d’une augmentation notable de la vente d’alcool depuis le début de l’année. Ce changement est davantage lié à la fermeture des lieux de convivialité depuis octobre qu’à une hausse réelle de la consommation.
Selon «le Parisien», en 2021, le volume de bière et de cidre écoulé a augmenté de 15,9% par rapport au premier trimestre 2020. (Romain Doucelin/SIPA)
publié le 26 avril 2021 à 18h11

Faute de mieux (et de lieux), les Français ont la picole casanière. Pour preuve : les ventes d’alcool ont sensiblement augmenté depuis le début de l’année, y compris en ligne. Et il n’y a guère de mystère, la fermeture des bars et des restaurants depuis octobre l’explique cette fois-ci pour beaucoup. Souvenez-vous : il y a un an, confinés version hard, les Français s’étaient d’abord rabattus sur les produits de première nécessité (œufs, farine, papier toilette), jusqu’à faire craindre des pénuries. Avec le déconfinement, les ventes d’alcool en grande surface, des vins aux spiritueux, étaient reparties à la hausse, mais sans s’accompagner d’une explosion de la consommation. Selon l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), dans une étude sur «les addictions au temps du confinement», les volumes d’alcool disponibles à la vente ont d’ailleurs été inférieurs en 2020 par rapport à l’année précédente. Seuls 11% des buveurs déclaraient par ailleurs avoir augmenté la picole contre 26% à l’avoir diminué. Peut-être par désintérêt (ou aversion ?) pour les apéros Zoom.

Moins de piquette, plus de bonnes bouteilles

Un an plus tard, alors que les lieux où lever le coude (pas plus de trois fois) sont administrativement fermés, c’est peu ou prou le même scénario à un détail près : les ventes d’alcool progressent, comme le rapporte le Parisien, avec une hausse de 15,9% du volume de bière et de cidre écoulé par rapport au premier trimestre 2020 et de 13% du volume de rhum et autres whiskys par rapport à la même période. En mars, les ventes de champagne auraient même crû de 117% selon les chiffres de la société d’étude IRI, confirmés par les représentants de la grande distribution cités par le quotidien. «Au premier trimestre, le champagne, mais aussi les vins blancs, les bières et les spiritueux ont tous enregistré une croissance à deux chiffres», semble se réjouir Audrey Sonnendrecker pour Carrefour. On peut la comprendre : pour l’institut Nielsen, le chiffre d’affaires des alcools a fait un bond de 14% depuis le 1er janvier. Une sacrée manne pour la grande distribution, d’autant que les acheteurs privilégieraient les bonnes bouteilles, plus chères, à la piquette ou aux tape-crâne.

Recours massif aux anxiolytiques

Mais de là à conjecturer une explosion de la consommation, importée des troquets à la maison, il y a un pas. Ce n’est pas ce qu’observent les experts de l’addictologie et de la santé publique depuis un an, plus inquiets par le recours massif des Français aux anxiolytiques ou le temps passé devant les écrans. «On ne peut pas comparer les ventes d’alcool à la consommation globale extérieure, tempère auprès de Libération le président d’Addictions France, Bernard Basset. Il faut être prudent : nos données montrent qu’il y a autant de gens qui ont augmenté leur consommation d’alcool que ceux qui l’ont baissé. La situation est contrastée.» Et l’ancien médecin de conclure : «Le fait qu’il y a plus de vente ne prouve pas qu’il y a une hausse de la consommation, car il y a aussi moins d’occasions de consommer.»