Si l’on sait aujourd’hui que la Terre est ronde, c’est grâce… aux épices ! Car l’épopée circumnavigatrice de Magellan n’a jamais eu qu’un seul but : trouver une nouvelle voie vers les Indes, en mettant cap à l’ouest, pour offrir à l’Espagne les fabuleuses richesses des Moluques où poussaient à profusion cannelle, girofle, noix de muscade, poivre et gingembre…
«Au commencement étaient les épices. Du jour où les Romains, au cours de leurs expéditions et de leurs guerres, ont goûté aux ingrédients brûlants ou stupéfiants, piquants ou enivrants de l’Orient, l’Occident ne veut plus, ne peut plus se passer “d’espiceries”.» Ainsi commence la belle biographie de Magellan sous la plume de Stefan Zweig. Et de fait, en ce début de XVIe siècle, les aromates sont des trésors qui valent plus que l’or. La nourriture européenne est en effet d’une fadeur et d’une insipidité inimaginables… Pomme de terre, maïs et tomate n’ont pas encore été adoptés dans les campagnes ; le sucre est une denrée rare ; on ignore le thé, le café ou le chocolat… Seules les précieuses graines et fèves venues d’Orient permettent de rehausser les plats (ou masquer leur moindre fraîcheur). «On n’apprécie vraiment un plat que s’il est poivré à l’excès et s’il vous emporte la bouche ; on met du gingembre même dans la bière et on aromatise si généreusement le vin avec des épices en poudre que la moindre gorgée vous brûle le gosier comme du feu liquide», poursuit Stefan Zweig. Et quand on ne les mange