En Tchéquie, à table, tout commence avec la bière. Bien sûr servie en demi-litre, sinon osez braver le regard condescendant du serveur et lui en demander une «petite» (soit 33 cl, il ne faudrait pas mourir de soif non plus). Il sera aussi nécessaire de préciser que, quand vous et votre ami commandez 2 bières, il ne s’agit pas de 2 bières chacun, mais de «2 fois 1 bière», pour être sûr de ne pas vous retrouver avec double dose. Et ne vous étonnez pas quand, alors que vous aurez à peine attaqué votre chope, le serveur vous ramènera la même chose. Il n’y a pas de temps à perdre au pays des plus gros buveurs de bière (en moyenne 146,8 litres par personne par an).

Une fois réglée la question de la bière (en France, on trouvera de la Pilsner Urquell à Monoprix, sinon toute bonne Pils fera l’affaire) on peut parler accompagnement. Et pourquoi pas du fromage ? Déjà, il permettra, paraît-il, d’éviter la gueule de bois (échange de bons procédés, la bière aiderait à digérer les plats gras). Et puis il y en a pour tous les goûts. On aurait par exemple pu vous proposer le fromage pané, plat végé par excellence, proposé à la carte de toutes les brasseries, avec ses frites, sa sauce tartare – sans oublier sa sempiternelle rondelle de concombre et son immuable quartier de tomate. On aurait aussi pu vous parler du fromage de bière, mais au risque de vous faire détaler : imaginez du fromage à pâte molle écrabouillé à la fourchette avec, entre autres, des morceaux d’oignon, du paprika, du beurre, et pourquoi pas des sardines, pour obtenir une bouillie ensuite arrosée de bière avant d’être étalée sur du pain (lui-même de préférence au cumin, grillé, trempé dans l’huile d’olive et gratté avec de l’ail).

Alors on s’en tiendra au hermelín mariné (nakládany hermelín), servi quasiment partout, des brasseries les plus crados aux cafés littéraires les plus courus à la sortie de l’opéra – à trouver au menu dans la colonne «chut’ovky k pivu», «pour accompagner la bière». Inventé après la Première Guerre mondiale par des fromagers pragois, le hermelín tient son nom de sa croûte, aussi douce et blanche que la fourrure d’hermine. Mais s’il a été inspiré par le camembert, il est plus petit et son goût reste bien fade surtout pour un public français, d’où l’idée de le manger imbibé de pleins de goûts différents.

Sur Internet et dans les livres, il existe des tas de recettes. On a choisi celle de toprecepty.cz

Il faut : 4 hermelín (à remplacer par 4 demi-camemberts) ; 1 gros oignon ; 1 piment rouge ; des herbes de Provence ; des épices pour barbecue ; 2 feuilles de laurier ; 10 grains de poivre ; du piment de la Jamaïque ; du paprika moulu ; de l’ail ; de l’huile de tournesol à gogo. (Et n’hésitez pas à en rajouter : figues, tomates séchées, noix, pruneaux, etc.)

Epluchez l’oignon et l’ail. Coupez l’oignon en rondelles et écrasez l’ail à plat avec un couteau. Coupez les fromages dans le sens de la longueur. Saupoudrez une des moitiés d’herbes de Provence. Tartinez l’autre moitié d’épices pour barbecue, d’ail écrasé, de tranches d’oignon et rassembler les deux moitiés de fromage comme un sandwich. Faites la même chose avec les trois autres hermelín (ou les trois autres demi-camemberts). Saupoudrez les fromages garnis de paprika moulu et disposez-les dans un bocal. Ajoutez le poivre, le piment de la Jamaïque, le laurier, le piment rouge, le reste de l’oignon et versez de l’huile jusqu’à tout recouvrir. Fermez le bocal et laissez reposer cinq jours à température ambiante.